Backstab N° 29 - avril 2001

La Chute
Où les personnages, partis pour sauter en parachute, vont participer à la chute — la mythique, celle qui concerna nos ancêtres Adam et Eve. Un problème de communication. Cela fait, les joueurs devront connaître leurs classiques pour tirer leur épingle de la seconde partie du scénario, qui va les mêler aux problèmes de Blanche Neige et de sa méchante belle-mère. Une autre histoire de pomme, toujours aussi empoisonnée.



Synopsis
Ce scénario est articulé en deux crises. La première est conclue par une RSVP (Cf. Des Recettes de la Folie), à l’accomplissement de quoi les personnages ne font que changer de délire. La seconde se termine par une PSVR, où les personnages retrouvent la réalité, quasiment au point de départ. Comme il n’y a pas d’explication à leur mésaventure, sinon un drôle de rêve tout éveillé, le meneur de jeu a toute liberté de continuer sur le même thème, et de concocter la suite d’une véritable campagne.

Les personnages
Les personnages sont tous des gens assez jeunes (entre vingt et trente ans), d’une situation financière suffisamment aisée pour leur permettre un loisir onéreux, et avant tout « sportif ». Pour être vraisemblable, veillez à ce qu’ils aient au moins 11 en Constitution. Cela dit, ils sont libres de leur profession ou occupation dans la vie.

Leur point commun est de s’être tous récemment inscrits à un club de parachutisme, pour pratiquer ce sport en amateur. Les premières séances n’ont été que de l’entraînement au sol, théorie et pratique; puis ils ont effectué un premier saut accompagné, avec l’un des moniteurs du club; voici enfin venu le grand jour celui de leur premier saut tout seul. C’est ici que commence véritablement le jeu, ce qui précède n’étant décrit que sous forme de background.

Quelle que soit leur profession véritable, les personnages doivent tous prendre Parachutisme en compétence professionnelle (Constitution, base 0).

Le club
Le club est situé sur l’aire d’un petit aérodrome, le genre de terrain d’aviation que n’utilisent pratiquement que des avions privés, situé aux environs d’une grande ville, Nous l’appellerons le Club de Parachutisme des Anges (CPA). Ses responsables se nomment Adam King et Eve Damier. Ils en sont également les instructeurs. L’avion utilisé est un vieux bimoteur DC12, piloté par un certain Roger Lecomte, retraité de l’armée de l’air. Par ailleurs, le club a recours aux structures de l’aérodrome, mécaniciens, techniciens, etc.

Adam King et Eve Damier sont fiancés, ils comptent bientôt se marier. Ils ont tous les deux dans les trente ans. Lui est blond aux yeux bleus, et elle brune aux yeux sombres, Ils sont sportifs, jeunes et beaux.

Décrivez tout cela aux joueurs tandis qu’ils créent leurs personnages. Puis le jeu ne commence réellement que dans l’avion.

Dans l’avion
La porte latérale du DC12 vient de s’ouvrir : tout en bas s’étend le patchwork vert et brun de la campagne. Adam King et Eve Damier sont tous les deux à bord. Les PJ, vêtus d’une combinaison de saut et casqués, viennent de sangler leurs parachutes. « Ça va être à vous dans un moment, annonce Adam King, dès que nous recevons le feu vert d’en bas ».

C’est alors que survient le premier problème. Eve Damier annonce soudain : « Roger ne reçoit plus rien... La radio est en panne, on ne peut plus communiquer ! » La consternation s’ensuit, mais est vite tempérée par Adam King. L’instructeur sort un téléphone portable de sa poche. « On communiquera toujours, assure-t-il, ce ne sont pas les moyens qui manquent ». Il compose un numéro et déclare bientôt dans l’appareil : « Allô ? ici Adam King. Nous attendons votre feu vert pour larguer nos élèves, mais nous avons un problème de radio. Rappelez-moi sur mon portable au 06 01 01 01 01 ». Il répète à plusieurs reprises ce numéro insolite, pour être sûr qu’il est bien enregistré. Deux minutes plus tard, le portable sonne. « Allô ?, fait Adam King, OK Feu vert, Paré à larguer… »

C’est maintenant que les personnages doivent y aller, et sauter dans le vide l’un après l’autre...

Alternatives : la radio en panne et le coup du portable peuvent faire tiquer les joueurs et les dissuader de sauter en fin de compte. Si c’est le cas, c’est tout l’avion qui tombe en panne, et soit les PJ se décident à sauter, soit ils s’écrasent avec l’avion. Ils commenceront alors la première crise avec un choc profond.

La Chute
Dès qu’ils touchent le sol, les PJ sont recouverts par leurs parachutes, comme un grand drap qui les enveloppe. Le temps de s’en dépêtrer, et ils constatent qu’ils se trouvent au milieu d’une sorte d’immense jardin aux allées rectilignes, bordé dans le lointain par des balustres de marbre, comme une terrasse. Dans le ciel tout bleu, plus trace de l’avion.

Le jardin est un potager entièrement consacré à d’énormes choux verts. Parviennent alors des vagissements, et les personnages découvrent qu’il s’agit de bébés — nichés au cœur des choux ! Dans certains, il n’y a que la tête et les épaules qui dépassent, d’autres ont des bébés complets, avec les jambes qui gigotent. Ce sont tous des garçons.

C’est à cette vision que les mots de démence font irruption dans la tête des personnages. Ils peuvent entrer en crise.

Les Limbes
Le grand jardin potager s’appelle les Limbes. En vérité, ce n’est pas une terrasse, mais une grande plate-forme flottante, surplombant une mer de nuages, On peut le constater depuis la balustrade de marbre. Cette dernière fait tout le tour du jardin et empêche de tomber dans te vide.

Dans sa totalité, le jardin des Limbes a la forme d’un 8. L’une des boucles est consacrée aux choux produisant des bébés mâles; la boucle opposée produit des roses, avec des petites filles. L’intersection du 8 est constituée d’un pont, ouvrage également de marbre, et surplombant pareillement le vide. Sous le pont, toutefois, il y a une trouée dans la mer de nuages, laissant voir le sol, environ deux mille mètres plus bas : un sol de campagne, vallonné et verdoyant.

Hormis les bébés, les seules habitantes du lieu sont des « cigognes ». Physiquement, elles sont de taille normale. Leur particularité (entre autres) est qu’elles parlent. De fait, les personnages auront à peine commencé à s’aventurer parmi les choux, qu’ils verront arriver une cigogne à tire d’aile, se poser près d’eux et engager la conversation. C’est ainsi, d’une manière générale, qu’ils obtiendront les renseignements suivants. Les cigognes ont tout de même des têtes d’oiseau et sont incapables de fournir des renseignements plus complets ou plus clairs. Elles ne savent pas, par exempte, quand arrivera le prochain Pégase, peut-être dans cent ans. Les PJ quant à eux ne savent toujours pas comment quitter ce délire. Sublogique aidant, ils devraient alors aller trouver Adam et Eve, puisque c’est précisément le nom de leurs instructeurs. Ne reste qu’à replier les parachutes et à sauter depuis le pont des Limbes.

Le Jardin d’Eden
Le jardin d’Eden est un véritable petit paradis, nimbé de soleil, odorant de fleurs et de fruits. Les deux jardiniers, Adam et Eve, y vivent dans te plus simple appareil. Tous les deux très beaux, ils ne ressemblent pas toutefois aux instructeurs. Ici, Adam est brun et Eve est blonde. Ils ne connaissent donc pas les PJ, mais ne sont pas non plus surpris de tes voir tomber du ciel « comme des fleurs » - Ils les prennent également pour des poètes. Vues d’ici, les Limbes apparaissent comme un petit nuage rose et bleu.

Adam et Eve vivent chacun de leur côté ; et de fait, ça ne va pas fort entre eux. Adam adore les bananes (il y a de nombreux bananiers); Eve les déteste, trouvant ce fruit vulgaire. Adam lui offre des bananes et il ne comprend pas pourquoi elle le repousse. Finalement, il la traite de pimbêche et elle le traite de macho. Pour se consoler, il fait de la musculation ; et elle prend des bains de soleil en grignotant des pommes — toute seule.
Les PJ vont ainsi discuter tantôt avec l’un, tantôt avec l’autre, et découvrir que leurs relations (intimes) sont à zéro — ce qui n’est pas étonnant dans un délire où les bébés sont livrés par les cigognes. C’est de cette constatation que va naître la RSVP.
La RSVP : la vraie preuve que tout ceci n’est qu’un délire, ce serait qu’Adam et Eve se retrouvent dans les bras l’un de l’autre, malgré les choux et les roses. Il va donc falloir les rapprocher, faire en sorte qu’ils se découvrent... Telle est la quête, mais comment faire ?

C’est évidemment Eve qui va suggérer la solution. Allez savoir d’où une telle idée lui vient, mais elle finit par déclarer aux PJ : « Entre Adam et moi, je le sens bien, il y a un problème de communication. Ce qu’il nous faudrait, c’est des portables ! Je pourrais l’appeler, il pourrait m’appeler, on s’appellerait, et on pourrait enfin communiquer ! Ah, si seulement j’avais un portable à lui offrir ! »

Supposant qu’Eve ait vu juste, où trouver des portables ? « Dans le Monde d’En Bas, répond la jeune femme, il y en a forcément. Venez, je vais vous montrer... » Elle conduit alors les PJ jusqu’au bord d’un grand cratère. Le vaste trou révèle que le jardin d’Eden n’est lui aussi qu’une plate-forme flottante et qu’il y a encore un niveau plus bas : un paysage grisâtre et indistinct. Normalement, les PJ devraient replier leurs parachutes et se résoudre à y sauter.

Le Monde d’En Bas
Le Monde d’En Bas est constitué d’une unique ville, un immense quadrillage de rue uniformes, bordées d’immeubles identiques, six étages de fenêtres, et des vitrines au rez-de-chaussée. Ici, le ciel n’est qu’une chape de nuages bas et sombres, et tout est noyé dans un crépuscule lugubre. Les rues ont des lampadaires, mais ils ne sont pas en service. Au demeurant il n’y a pas un habitant. Des voitures circulent dans les rues, mais en toute autonomie, sans pilote. Il y en a également en stationnement, de même que de grosses citrouilles. Quant aux magasins, ils vendent tous la même chose : matériel vidéo, audio, et surtout des ordinateurs.

Automobile
COMBAT 12 VIGILANCE 11 COURSE 14
Dommages : C, choc
Résistance : 16
Incrédulité : -3, 2 pts, grosse citrouille

Matériel
Incrédulité : -1. 1 Pt. démon agressif

Démon
COMBAT 13 VIGILANCE 12 COURSE 10
Dommages B, griffes et cornes
Résistance : 12
Incrédulité : impossible (déjà incrédit)

Les personnages vont atterrir au beau milieu d’un carrefour; dans un concert de klaxons. A la vue des magasins, tous voués au multimédia, ils vont d’abord penser qu’y trouver des portables va être facile, pour bientôt déchanter. Les magasins sont faux, les vitrines ne sont que des décors en trompe l’œil, Plus encore, les immeubles aussi sont faux. Ils ont de vraies portes, mais les fenêtres ne sont que peintes sur les façades. On peut y entrer, mais intérieurement, ce ne sont que de grandes coquilles creuses, vides, et pleines d’écho...

Enfin, pas partout. Des objets gisent parfois sur le sol bétonné, pêle-mêle : magnétoscopes, téléviseurs, ordinateurs — le matériel censé être propose par les magasins. Hélas, dans cette diversité électronique, pas l’ombre d’un téléphone portable !

Dans le Monde d’En Bas, les objets sont pervers. Si les PJ touchent à une voiture en stationnement celle-ci s’animera, se mettant en marche, pour les agresser. Elle peut même appeler des consœurs à son aide. Incrédites, les voitures deviennent des citrouilles; et inversement pour les citrouilles déjà en stationnement. Le matériel éparpillé dans les immeubles ne bronche pas quand on le touche, mais on ne peut pas le mettre en service pour la bonne raison qu’il n’y a aucune alimentation électrique. Incrédit, tout objet devient un petit démon, cornu, griffu, et très méchant.

Laissez tes joueurs tourner en rond quelque temps, puis attirez leur attention sur un bruit qui leur parvient par moment : sourd, rythmé, comme des percussions... Il s’agit d’un grand tam-tam animé. Pourvu de deux bras grêles. L’instrument se frappe lui-même sur la « tête » du plat de ses mains. Ce tam-tam se trouve dans un quelconque immeuble. Quoique animé, il n’est pas agressif. Il est indifférent aux PJ. Incrédit (-2. 2pts), il devient une cabine téléphonique.

Puis un autre bruit identique peut se faire entendre. Mais cette fois, le grand tam-tam est entouré de toute une marmaille de bébés tam-tam. Le raisonnement sublogique est alors évident. Si le grand tam-tam est une cabine téléphonique, que peuvent être les petits ? Incrédit (-2, 2 pts), chaque bébé tam-tam devient un téléphone portable.
Reste la question du retour. Comment remonter jusqu’au jardin d’Eden ? Au cours de leurs pérégrinations, les PJ auront pu remarquer une petite place pourvue d’un banc public flanqué d’un lampadaire. Or, merveille quand on s’assoit sur ce banc, on voit le lampadaire allumé, ainsi qu’un croissant de lune dans un ciel étoilé à la place des nuages bas, le tout bercé d’une douce musique apportée par la brise. Une pure poésie... qui s’éteint dès qu’on quitte te banc. Et de fait, incrédire le banc ou le lampadaire (-3, 1 Pt) change le tout en un beau Pégase. C’est sur le dos du cheval ailé que les PJ pourront revenir trouver Eve.

Eve tend un portable à Adam, qui l’accepte, ému. Il appelle la jeune femme, qui lui répond, qui l’appelle à son tour. Ils communiquent enfin. Les voilà rapprochés, si proches que leurs lèvres se joignent avec passion. Témoins de cette scène, les PJ accomplissent.

La pomme
Ayant accompli, les PJ se retrouvent dans une plaine herbue, à proximité d’un grand baobab, le seul arbre de la plaine. Ils portent toujours leurs combinaisons de saut, mais n’ont plus de parachute. (Éventuellement, vous pouvez les vêtir à la saint-frusquin, cela n’a pas d’importance.)

Au nord, la plaine est bordée par des montagnes. Au sud, elle est bordée par une forêt A l’ouest, par des collines. À l’est, elle se poursuit, vide et sans repère. C’est de cette direction qu’apparaît bientôt un cavalier — un cavalier mongol (culottes bouffantes, gilet brodé, bonnet de fourrure conique). Sur l’encolure de son cheval, il tient un grand régime de bananes. Arrivant près des PJ, ralentissant à peine, il en détache un fruit qu’il leur lance; puis sans un mot, il reprend son galop vers les collines de l’ouest.


C’est alors que les PJ remarquent qu’un avion tourne dans le ciel. Il décrit de grands cercles au-dessus de la plaine, comme s’il avait le baobab pour pivot. Il n’est pas très haut, et l’on peut voir que c’est un bimoteur. Plus encore, on dirait le DC12 du club... A cette vue, les PJ ont soudainement ta perception de leur « vraie réalité ».

PSVR : dans la « vraie réalité », ils regardent pareillement le bimoteur tourner dans le ciel. Mais voici que des points sombres en jaillissent, bientôt suivis de l’ouverture de parachutes... Telle est alors la quête pour accomplir : faire en sorte que des parachutistes sautent de l’avion, afin d’en observer la descente.

Sublogique : les PJ savent que le saut n’a lieu que si on donne le feu vert d’en bas. Étant en bas, ce pourrait maintenant être à eux de donner ce feu vert. Et rien de plus simple pour cela : appeler Adam King sur son portable au 06 01 01 01 01.

La première urgence va donc être de trouver un téléphone. Cela dit, vers où aller ?

À l’ouest, au pied des collines, se trouve un petit village, dominé par un château. C’est dans cette direction qu’allait le cavalier; et il serait logique que les PJ fassent de même. À l’est, dans la direction opposée, se situe la bananeraie du Grand Mogol. Au nord, dans les montagnes, les PJ n’ont rien à faire, Ils auront par contre à se rendre dans la forêt au sud, mais plus tard, Pour l’instant, ils n’y découvriraient rien. Tous ces lieux sont équidis-tants du baobab central, d’une bonne heure de marche.

La bananeraie
C’est une vaste plantation de bananes, tenue par une tribu mongole. En dépit de leur comportement, ces Mongols ont physiquement une apparence authentique. Ils vivent dans des tentes de peau, ils ont des chevaux, ils sont armés de yatagans. Leur chef, le Grand Mogol, vit dans une tente magnifique, parmi des coussins richement brodes.

La tribu prépare actuellement la grande fête de la Banane. Au son des instruments typiques, il y aura un grand bal, avec des dégustations, et même des lancers de bananes. Puis un jury présidé par le Grand Mogol élira Miss Banane. Toutes tes filles peuvent s’inscrire. Tout le gratin de la région est censé être invité.

Les Mongols n’ont pas le téléphone et ne savent même pas ce que c’est. Les PJ pourront par contre obtenir des bananes, les Mongols en font cadeau avec largesse.

Banane
Incrédulité : -3, 2 pts, pistolet chargé, six coups, dommages D.

Le village
Entouré de cultures, de champs et de prés. c’est un petit village médiéval (imaginez que vous jouiez maintenant en médiéval fantastique). On y trouve quelques échoppes et artisans, un cordonnier; un tailleur; etc. Au milieu de la place centrale se dresse une fontaine, et sur cette place donne également une auberge : l’auberge du Paradis Perdu (le nom du village est quant à lui le même que la localité où se trouve l’aérodrome dans la réalité.). Il n’y a aucune cabine téléphonique au village.

L’auberge du Paradis Perdu est tenue par un couple bien connu des PJ : Adam et Eve. Ces derniers toutefois ne sont plus tout nus. Ils sont vêtus à la mode locale, et en vérité plutôt pauvrement. Le pourpoint d’Adam est quelque peu râpé et la robe d’Eve a des reprises. Les deux personnages ont changé, également, et pas en bien. Adam a grossi ; et Eve, jadis belle et pétillante, est devenue triste et négligée.

Le château
C’est un palais de conte de fée, surchargé de tourelles, poivrières, clochetons et balcons, Il est entouré d’un grand parc lui-même ceint d’un mur. La grille d’entrée est gardée par deux hommes cuirassés et armés de hallebardes. Le château est la résidence de la Reine et de sa belle-fille, la princesse Blanche Neige. La reine n’a pas d’autre nom que la Reine et le pays s’appelle le Royaume sans autre précision.

La Reine possède un miroir magique qui lui permet de vérifier si elle est la plus belle. Quant à Blanche Neige, vêtue en paysanne, elle s’occupe des citrouilles qui poussent au fond du parc.

Il n’y a pas le téléphone au château. De toute façon, les PJ ne pourront pas y pénétrer sans autorisation. En revanche, ils peuvent visiter le parc, qui est libre d’accès aux touristes. Les gardes leur ouvriront la grille, en leur précisant qu’ils ne doivent commettre aucune dégradation ni abandonner de détritus

Les montagnes et la forêt
Dans les montagnes, sept nains travaillent dans une mine de joyaux. A moins de les suivre — et ils ne se laisseront pas faire — il est impossible d’en localiser l’entrée. Les montagnes sont de surcroît hantées par des démons, les mêmes qu’à la crise précédente. Incrédits (-2, 2 pts), ils deviennent des ordinateurs.

Les nains habitent par contre dans la forêt, dans une petite maison, quelque part dans une clairière. Ils font ainsi le trajet matin et soir. Ils n’ont pas le téléphone. La forêt est hantée par tes mêmes démons,

Alternatives : si les PJ vont vers l’est, ils finiront par aboutir à la plantation. Là, les Mongols très « bananocentriques » ne pourront pas les éclairer beaucoup, sinon leur indiquer qu’à l’ouest se trouve un village et le château de la reine. Dans toutes les autres directions, les PJ commenceront par tomber sur les sept nains, rentrant du boulot tout en chantant « Ay Hi ! Ay Ho ! ». Discrets sur eux-mêmes et peu bavards, les nains indiqueront néanmoins l’existence du village et du château. Lors, en toute vraisemblance, c’est là que devraient finir par aboutir les PJ.

Adam et Eve
Les aubergistes ne se rappellent que vaguement tes PJ, comme un souvenir appartenant à un rêve, Il en est de même de leur vie antérieure. Ils croient savoir qu’ils étaient autrefois heureux et insouciants, tandis que maintenant la vie est dure et ils sont pauvres. Et comme chacun en rejette la responsabilité sur l’autre, ils sont plus désunis que jamais, ne s’adressant la parole que pour s’invectiver.

Et vos portables ? À cette question. Eve se détourne et s’enfuit en pleurant. Les PJ n’en tireront rien dans cette crise-là. Adam est plus bavard : Eve a fini par cesser de l’appeler; confie-t-il. Alors il a fait de même. Il a caché son portable quelque part, et fait le serment inviolable de ne le sortir de sa cachette que le jour où Eve sera sur le point de l’appeler.

Adam aime toujours autant les bananes, et lui en offrir est le meilleur moyen d’obtenir ses confidences. Il peut alors avouer qu’il regrette le temps de son entente avec Eve et qu’il aimerait lui faire plaisir. Parfois la nuit, Eve rêve tout haut des pommes qu’elle grignotait autrefois, et elle en soupire Adam aimerait lui offrir une pomme. Mais ces fruits sont rarissimes, et il ne sait pas où en trouver.

La solution
Les PJ doivent aller trouver Blanche Neige au fond du parc. La jeune fille est triste. Un émissaire du Grand Mogol est venu apporter des invitations pour la fête de la Banane, mais elle ne pourra pas y aller parce qu’elle n’a pas de belle robe. Et puis elle ne peut pas y aller à pied.

Incrédite (-1, 1 pt), la robe de paysanne devient une robe de bal, et la jeune fille nettement plus jolie. Incrédite (-3, 2 pts), toute citrouille devient une grande limousine blanche, et à cette vue, rayonnante de joie, Blanche Neige devient irrésistiblement jolie.

Il n’en faut pas davantage pour que le miroir magique se mette à cafeter. Ivre de jalousie, la reine ordonne alors au maître des chasseurs d’emmener Blanche Neige dans la forêt sous prétexte de promenade, de la tuer; et de rapporter son cœur.

Il faut bien sûr intervenir; mais pas tout de suite, afin que les gardes du palais ne s’en mêlent pas et que tout se déroule aussi près que possible du conte de Grimm. Le mieux est de suivre le cheval du chasseur (en limousine par exemple) et de ne libérer la princesse qu’arrivé à la forêt, loin du château. Pour le sauvetage, une banane incrédite peut s’avérer utile. Cela fait, il faut conduire la jeune fille à la maison des sept nains.

Maître Chasseur
COMBAT 13 VIGILANCE 13 COURSE 11
Dommages : B+1, couteau de chasse
Résistance : 12

Couteau de chasse
Incrédulité : -2, 2 pts, quenouille

Garde du palais
COMBAT 14 VIGILANCE 14 COURSE 10
Dommages : C+ 1, hallebarde
Résistance : 14

Hallebarde
Incrédulité : -2, 2 pts, fuseau de laine

Pour trouver la maison, les joueurs doivent tirer un jet de CHANCE et obtenir une intensité globale de 3 points (comme pour les incrédulités). Recommencer autant de fois que l’intensité n’est pas obtenue, mais chaque échec fait rencontrer à la place un démon errant dans la forêt. Attendre les nains dans la plaine (rentrant du boulot) et leur confier directement Blanche Neige n’est pas une bonne idée. Trop misogynes, ils n’en voudront pas. Il faut les mettre devant te fait accompli, et que Blanche Neige puisse faire le ménage, le repas, afin de les amadouer.

Le lendemain, les nains repartiront travailler en recommandant à Blanche Neige de n’ouvrir à personne. Les PJ doivent rester dissimulés à proximité de la maison, prêts à réagir à l’arrivée de la reine sorcière, laquelle ne tardera pas, effectivement, travestie en vieille marchande de pommes... Bref, on connaît le conte.

En l’occurrence, peu importe que Blanche Neige soit ou non empoisonnée, ni ce qu’il advient de la méchante reine. L’essentiel est de s’emparer d’au moins une pomme saine (dans le conte, il n’y a que la plus rouge qui soit empoisonnée) afin de la rapporter à Adam.

Celui-ci l’offrira à sa compagne, qui l’acceptera, les larmes aux yeux. Elle mordra dedans, puis lui tendra le fruit entame : « Tu en veux aussi un bout ? ». Finalement, ils la croqueront à eux deux, avant de se retrouver enlacés comme au beau temps des portables — lesquels seront incontinent exhumés de leurs cachettes.

Accomplissement
Leur bonheur retrouvé, Adam et Eve ne feront aucune difficulté à prêter leurs téléphones aux PJ. Ne restera qu’à composer d’un doigt tremblant le 06 01 01 01 01, (durant tout ce temps, le DC12 n’a cessé de tourner au-dessus de la plaine.) C’est bien la voix d’Adam King qui répond, quoique un peu impatientée : « Ah, tout de même ! Ça fait un siècle que j’attends votre appel ! ». Dans la minute qui suit, quatre corolles éclosent dans le ciel bleu. Les PJ peuvent les regarder descendre, béats, Ils accomplissent...

…pour se retrouver sur l’aérodrome du CPA, le cou tendu vers les parachutistes qui descendent, tandis que, plus lointain, le DC12 perd déjà de l’altitude. Près d’eux, Eve Damier s’exclame joyeusement : « Bon, c’est à vous dans un quart d’heure ! Pas trop le trac pour votre premier saut ? ».

Que s’est-il passé ? Les PJ se sont-ils assoupis (tout debout) ? Ont-ils rêvé tout cela ? Ils sont revenus au point de départ, et même encore plus tôt, puisqu’ils ne sont pas encore montés dans l’avion. Leur baptême de saut en parachute appartient encore au futur.

On peut supposer qu’un frisson désagréable douche alors leur enthousiasme.

Auteur : Denis GERFAUD
Illustrations: Nicolas Ryver