Casus Belli N° 76

En piste

Paris, un soir d’automne. Les PJ sont en route pour le Louvre où les attend le Prince, Son Excellence François Villon. Même s’ils sont parvenus à contrer les plans de Verlange dans La ballade de l’oublié (voir Casus Belli hors-série n° 6), nos jeunes vampires sont loin de la notoriété à laquelle ils aspirent sûrement au sein de la société parisienne. Tout au plus a-t-on pris note de leurs récents exploits. Au Louvre, Villon reçoit les PJ, entouré d’une cour somptueuse et agitée. Devant une assistance attentive, il explique aux personnages ce qu’il attend d’eux :

Il s’agit cette fois d’une mission de confiance. Peter Mc Fulton, vieil ami de ViIlon, a besoin d’aide. De son petit village d’Ecosse, il a adressé au Prince de Paris une missive suppliante.

« François,
Au nom de notre ancienne amitié, tu dois m’apporter ton aide; toi seul le peux, et tu sais pourquoi, mon ami elle est revenue. Ne me demande pas comment ni pourquoi, après tout ce temps. Les souvenirs de ces années maudites reviennent hanter ma mémoire, même si je sais que tu m’as depuis longtemps déjà accordé ton pardon. Pour l’amour du passé, François, envoie-moi de l’aide. Tu sais que jamais je ne pourrai quitter mon cher Strenway et ses sombres collines. Je suis seul, ici. Fais vite.
Peter. »

Froissant la lettre dans son poing, Villon darde sur les PJ un regard de glace :

« Bien qu’il me répugne de remuer les cendres d’un passé oublié, je me dois de porter secours à cette canaille de Mc Fulton. Il vous expliquera ses problèmes lui-même. Je compte sur vous pour régler la situation aussi vite que possible et vous montrer à la hauteur de votre réputation naissante. Asgaard (tous les regards se tournent vers une sorte de géant blond, vêtu de jeans déchirés, adossé bras croisés à une statue antique) vous tiendra compagnie. La prudence et la discrétion seront comme toujours vos alliées les plus fidèles. Souvenez-vous : “Nécessité fait gens méprendre et faim saillir le loup du bois”. Hum. Messieurs, je vous souhaite bonne chance.»

Les voyages forment la jeunesse

Gagner le petit bourg de Strenway, niché dans les Highlands, ne sera pas chose aisée. Le conteur peut faire jouer ce voyage rapidement, mais il serait plus intéressant de semer le parcours d’embûches diverses. Les ports, les gares et les aéroports sont contrôlés en permanence par un ou plusieurs vampires; il est par conséquent quasiment impossible de passer inaperçus.
De plus, l’Angleterre est plongée dans une époque de troubles profonds et la paranoïa exacerbée qui règne désormais sur le pays rendra toute rencontre, au mieux, problématique. A Londres, le Prince ne donne plus signe de vie; Edimbourg est rongée par la décadence et la misère sous l’œil indifférent d’un toréador libéral. Glasgow pour sa part est déchirée par le conflit qui oppose les Ventrue aux Brujah. Pour plus d’informations sur la situation de l’Angleterre, le Mise référera au guide World of Darkness. D’autres difficultés peuvent surgir à volonté: comment trouver une voiture de nuit à Glasgow ? Comment éviter les garous du clan des Fianna, dont les féroces hurlements planent sur les Highlands comme une menace indicible? Bref, le voyage ne sera sans doute pas de tout repos.
Quelques heures avant le lever du jour, les PJ arrivent finalement en vue de Strenway: une poignée de petites maisons, serrées frileusement les unes contre les autres. Une petite église, un peu à l’écart. Un cimetière qui semble presque abandonné. Comment un vampire peut-il vivre ici?

Strenway, here we are !

Asgaard a été désigné par Villon comme le chef du groupe (il est plus âgé que les PJ). Sortant du mutisme dans lequel il se complaît depuis le début du voyage, jette un œil à la feuille d’instructions que lui a remis son Prince et s’arrête devant une bâtisse d’aspect modeste mais robuste, qui donne sur la grand-place. « Je crois que c’est ici », lâche-t-il. Il tape doucement à la porte et au bout de quelques minutes, une vieille femme toute ridée vient leur ouvrir. « Je suis Lennie », dit-elle avec un accent particulièrement prononcé. Elle semble sans âge. « Entrez, le Maître vous attend. » Nos amis pénètrent dans un salon cossu. Lennie ouvre une trappe de sous un tapis et invite les vampires à la suivre dans un escalier qui descend. Arrivés en bas, les Pj découvrent un véritable palais, qui s’étend sur une surface bien plus importante que celle de la maison. De grandes pièces meublées avec un luxe insolent attestent du goût prononcé de Mc Fulton pour les belles choses. Des tableaux de maître côtoient des sculptures exotiques, et les styles les plus divers se marient avec un certain bonheur: commode Louis XVI, secrétaires rococo, divans Belle Epoque; partout, l’œil est accroché par une nouvelle trouvaille. Un « homme » imposant se lève de son fauteuil de cuir pour souhaiter la bienvenue à ses invités. Mc Fulton arbore un sourire un peu triste mais fait le maximum pour mettre ses hôtes à l’aise. Après les politesses d’usage, il invite les personnages à le suivre dans le salon, et leur expose les faits.

En fait...

Tout commence en 1804. Pendant toute la durée du règne de Napoléon 1’, Villon restera mystérieusement absent de la cour parisienne, donnant de temps à autres quelques signes de vie dès qu’on parle de lui trouver un successeur. A cette époque, pris d’un besoin impérieux de faire le point et de se ressourcer, Villon par-court l’Angleterre, drainant dans son sillage une foule de jolies filles et d’esprits brillants. Parmi eux, Peter et Lenna Mc Fulton, un couple de jeunes mariés. Séduit par l’innocence de Peter, Villon décide de s’en faire un compagnon plus intime, et lui offre — par l’intermédiaire d’un autre vampire, Asgaard —, l’immortalité. D’abord horrifié, Peter développe peu à peu une sorte de passion morbide pour sa nouvelle situation et propose finalement à Lenna, sa femme, de lui donner à son tour la vie éternelle. Celle-ci refuse, par peur et par conviction religieuse, mais sentant son époux s’éloigner d’elle inéluctablement, consent à devenir sa goule. A partir de ce moment, elle arrête de vieillir. Durant quelques années, Peter, Lenna, Asgaard, Villon et quelques autres sillonnent l’Ecosse en quête d’émotions et de rencontres. Un soir, en 1814, Villon et Mc Fulton dénichent une jeune beauté de vingt ans, Lisbeth, dans un pub enfumé au cœur de Glasgow. Tous deux en tombent instantanément — et éperdument — amoureux. Ils l’emmènent avec eux. Déchiré par la rancune et les jalousies, le petit groupe n’est plus que l’ombre de lui-même; déjà, Villon songe à se débarrasser de son ami d’hier. Peter, lui, se montre de plus en plus pressant dans ses avances, et la jeune femme est prête à accepter le don qu’il lui propose. Le Prince de Paris, écœuré, ne l’entend pas de cette oreille. Le drame éclate.
Alors que notre petite troupe est réunie chez les Mc Fulton, à Strenway, une dispute violente oppose Villon à Peter. Rapidement, les deux vampires en viennent aux mains. Dans la confusion qui s’ensuit, Asgaard prend la fuite avec Villon, Peter et Lenna sont blessés et Lisbeth gît à terre, morte. Dans les années qui vont suivre, Villon rentre à Paris et reprend le commandement de la ville pour noyer sa douleur. Mc Fulton, terrassé, insensible aux protestations de sa femme qui jusque-là a tout supporté stoïquement, enjoint à cette dernière de partir, définitivement. Anéantie par cette décision, Lenna gagne Edinburgh, où une vieille tante la recueille. Elle recommence à vieillir; la vie, en apparence, reprend ses droits. Mais Lenna mûrit sa vengeance, et s’adonne dans l’ombre à la sorcellerie, auprès d’un obscur mage écossais, Alficante. Puis, en 1866, sentant la mort approcher, elle prend le chemin du retour, direction Strenway. Entre-temps, Peter, resté seul, a fait la paix avec lui-même et avec Villon. Lisbeth hante encore parfois ses pensées, mais plus ses cauchemars. Quand il voit revenir vers lui, après toutes ces années, celle qu’il a sacrifiée aux plaisirs de sa folle jeunesse, la pitié l’envahit. Il la reprend chez lui. Elle devient sa servante en même temps que sa confidente. Mais son âme n’est plus qu’un concentré de haine et de rancœur. Le siècle qui suivra lui donne le temps de penser: elle est redevenue la goule de Peter. La méfiance de ce dernier est totalement endormie. Lenna (ou « Lennie ») hésite. Puis se décide.

La version de Peter

« J’ai fait la connaissance de votre Prince il y a de cela plus d’un siècle et demi. Je me souviens maintenant de lui avec tendresse, mais à l’époque, il y avait comme une barrière entre nous. Elle s’appelait Lisbeth... »
Suit un couplet émouvant sur la jeunesse et la grâce de cette égérie divine, et la passion effarante qu’elle inspirait à ceux qui la connaissaient: c’est le moment pour le conteur de sortir le grand jeu !
« Mais elle mourut, tuée par notre amour (nouvelle variation romantique sur le thème éculé de l’amour assassiné). J’ai cru pouvoir l’oublier. En fait, j’y suis réellement parvenu.., jusqu’en 1954. C’est à cette époque que j’ai commencé à... à la voir. J’ai cru tout d’abord à l’hallucination. Elle se tenait ici-même, dans ce salon. Elle me souriait, et je me levai pour la toucher mais bientôt je reculai, pétrifié d’horreur. Son sourire s’élargit en un rictus grotesque et sanglant, et elle tomba à genoux, les bras tendus vers moi. Je constatai avec terreur que son ventre était ouvert et que ses entrailles palpitaient d’hideuse façon, emplissant mon crâne d’un martèlement sourd, obsédant, qui allait en s’amplifiant comme les accords monstrueux d’une symphonie désarticulée. Je tombai à genoux à mon tour. Puis, à mon intense soulagement, la vision se dissipa peu à peu. Je me crus victime d’un cauchemar. Je pensais pouvoir l’oublier; quand on a l’éternité... Mais cette... cette horreur me poursuit.
En 1957, je vis Lisbeth à nouveau. Puis en 1959. A partir de 1966, elle m’apparut tous les ans. Tantôt je la voyais petite fille, assise sur une balançoire, les deux bras arrachés, me souriant. D’autres fois, elle était allongée sur son lit de mort, vieille et raidie, et elle pleurait des larmes de sang en murmurant mon nom. Je serais bien en mal de vous faire l’inventaire de toutes les horreurs que je subis, d’autant que ces visions m’assaillent désormais presque toutes les nuits. je suis en train de sombrer; la folie est sur le point de gagner sa bataille. Je ne puis plus supporter cette solitude et la présence de Lennie, pour réconfortante qu’elle soit, ne m’est pas d’une très grande aide. j’ai pensé que seul Villon maintenant pouvait avoir encore pitié de moi, suffisamment du moins pour m’apporter son aide. C’est pourquoi mes amis, je vous supplie de découvrir l’origine de la malédiction qui m’accable. Car je suis le seul à en subir les assauts : Lennie ne voit presque plus rien ! »

Le village

Perdu au milieu des landes folles et sauvages du nord de l’Ecosse, Strenway est un village typique des Highlands. Vieux de près de cinq siècles, ce petit bourg a connu son heure de gloire en 1 780, mais ces moments fastes sont désormais bien loin. Aujourd’hui, les jeunes quittent le village pour aller tenter leur chance à Glasgow ou ailleurs, et Strenway n’est plus que l’ombre de lui-même: une misérable congrégation de vieillards timorés, unis par la mémoire embellie d’un passé idyllique. Ceux qui gardent les yeux ouverts savent maintenant que Strenway va mourir. Dans des circonstances moins dramatiques, la présence de Mc Fulton passa presque inaperçue au siècle dernier. Officiellement, il est mort en 1856, alors que les langues commençaient à se délier et que les commérages allaient bon train. Depuis, il vit en reclus sous la surveillance de Lennie. Cette dernière ne fait rien pour cacher le fait qu’elle ne vieillit plus, mais la chose n’étonne plus personne: à peine si quelques curieux ont parfois tenté de mener leur petite enquête (on n’a plus jamais entendu parler d’eux, d’ailleurs). Lennie passe pour une veuve sans âge, presque une relique, aussi vieille et respectable peut-être que le village lui-même. Les rares personnes qui ont fait le rapprochement entre « l’ancêtre » et la jeune Lenna Mc Fulton dorment depuis longtemps à l’ombre des cyprès du vieux cimetière communal, où l’on peut encore apercevoir la tombe à moitié défoncée de Peter Mc Fulton, 1 779 - 1856. Lennie assure la subsistance du o maître» grâce au sang des moutons du village qu’elle va collecter la nuit tombée, ce qui a donné naissance à de nombreuses légendes (« la dame en noir », « le vampire des landes »; là encore le conteur peut laisser courir son imagination). Quelquefois, Peter a droit à un extra, lorsque sa vieille servante invite les femmes du village à venir bavasser avec elle autour d’un bon bol de soupe chaude. Elles en sont quittes, le lendemain matin, pour de vagues vertiges accompagnes d’un sentiment de vide intérieur, et deux petites marques sur le cou. De toute façon, Peter est totalement dépourvu de cruauté et est parvenu à réfréner ses pulsions avec une volonté et un courage que lui envieraient bon nombre de ses congénères.
Actuellement, il ne reste que vingt-huit habitants à Strenway. Luke Jeanson est le pasteur de la paroisse. Massif, doté d’une imposante barbe noire, il a malheureusement sombré dans l’alcoolisme depuis longtemps, mais reste sympathique et pourrait même chercher à engager la conversation avec les « étrangers » devant un petit whisky (cela risque de poser un léger problème...). Les Mc Gregor, les Ben Gury, les Dehensons et les Mc Roberts sont les quatre familles principales; conservatrices et méfiantes, elles appartiennent déjà au passé. Ils sont seize en tout. Le père Mc Gregor est le maire du village. Les Zantzny sont un jeune couple d’origine hongroise venu chercher l’inspiration pour un roman qui s’éternise depuis dix ans. Les Debrends et les Mc Henson se détestent cordialement depuis une bonne douzaine de générations, mais n’attisent le feu de leurs querelles que par des mesquineries dérisoires qui n’intéressent qu’eux. Quant aux Roger, ils vivent un peu à l’écart de Strenway et prétendent perpétuer le culte d’un vague ancêtre druidique: ils sont à moitié fêlés.

Ce qui peut se passer


Ce scénario n’est dirigiste que dans la mesure où les Pj ne font pas preuve de suffisamment d’imagination et d’esprit d’initiative. Si les choses traînent en longueur, certains événements seront inéluctables.
Nuit n° 1. Lenna reconnaît Asgaard, et est saisie par la crainte qu’il ne l’identifie à son tour, ce qui est le cas. Cependant, tous deux n’en laissent rien paraître. Asgaard ne songe pas une seule seconde à mettre Lenna en péril. Villon a pensé en le laissant partir à Strenway qu’il serait heureux de revoir Mc Fulton. Il ignore tout de la haine qui oppose les deux vampires (voir les PNj). Dès que cela lui sera possible, Asgaard aura une petite conversation avec Lennie et par la suite fera tout pour l’aider à mettre son plan en œuvre, allant jusqu’à envoyer les Pj sur de fausses pistes.

Nuit n° 2. Le père Jeanson, ivre, va cuver au fond du souterrain qui relie la cave de Mc Fulton à la crypte de l’église (située, comme la demeure du vampire, à la sortie du village). Ayant encore plus bu que de coutume, il pense — à raison — entendre des voix au fond du tunnel. Eperdu de frayeur, il sort dans la nuit glacée et crie sa terreur à tue-tête, réveillant tout le village. Scandalisés, les habitants ne croient pas un mot de ses explications incohérentes et lui passent la tête sous l’eau froide avant d’aller se recoucher. Cependant, les Roger ont vent de l’histoire le lendemain et vont interroger le prêtre. Excités par son histoire qu’ils croient à moitié, ils comptent explorer la crypte de l’église un jour prochain.
Nuit n° 3. Lenna, qui sombre de plus en plus dans la folie, tente maintenant de convaincre Asgaard de faire d’elle sa goule, puisqu’elle compte se débarrasser à jamais de Peter. Le vampire refuse dans un premier temps. Les Pj pourront peut-être surprendre les éclats de voix attestant de leur dispute. Durant la même nuit, la vieille femme provoque une apparition cauchemardesque dans la crypte de l’église. Le père Jeanson, confronté au fantôme dénudé d’une jeune femme avec qui il avait péché lors de son tumultueux passé, devient à moitié fou. Il se dirige vers la maison de Lennie, une hache à la main, avec la ferme intention d’accomplir un exorcisme « musclé ». De toute évidence, il commence à se douter de quelque chose, et il est vraiment furieux. Le tuer entraînerait bien des complications...
Nuit n° 4. Durant toute la journée, le village est en ébullition. D’une part, les autres familles ne font pas du tout confiance aux Roger qu’elles ne sont pas loin d’accuser — non sans une mauvaise foi confondante — d’être responsables des divagations (ou de la disparition, voire du meurtre) du pasteur; et d’autre part, personne n’est suffisamment courageux et déterminé pour tenter une exploration de la crypte. Personne ne soupçonne encore vraiment Lenna, sauf les Roger. La nuit venue, Mark Roger tente de percer le secret du tunnel de la crypte mais aperçoit à son tour un « fantôme » : son fils Lenny, mort d’une leucémie à l’âge de six ans. Il perd connaissance sous le choc de la vision. A son réveil, il n’est plus dans le tunnel :
Lenna l’a traîné devant la porte de l’église, en prenant soin d’effacer ses traces de pas.
Nuit n° 5. Avec l’arrivée de l’inspecteur de police Georges Delcy, installé chez le maire, les choses se gâtent. Une enquête serrée devient inévitable. A ce point du scénario, si le mystère n’est pas résolu, la situation devient extrêmement dangereuse pour tous les habitants de la maison Mc Fulton. Une perquisition n’est pas à écarter, d’autant que certains commencent à parler, (« il se passe des chose louches chez la vieille Lennie, inspecteur. Tenez, moi la nuit dernière, je ne dormais pas, et bien... »). En dernier recours, Asgaard dira la vérité pour sauver ce qui peut l’être. Mais il essayera d’abord de supprimer Peter.

Indices

Nos jeunes vampires ont les moyens d’influer sur le cours des événements. S’ils parviennent à explorer l’étage de la maison Mc Fulton, ils pourront trouver une compilation d’articles de journaux relatant certains événements du début du XIXè siècle: troubles et assassinats à Glasgow, mort de Lisbeth, etc., qui prouvent que Lennie s’intéresse à l’affaire d’étrangement près pour une simple servante censée n’être née qu’en 1905. Une vieille robe des années 1820, souvenir déchirant d’une époque révolue, perdue dans l’armoire de Lennie au milieu de vêtements plus actuels, peut également attirer l’attention. Moins cependant que ce vieux grimoire de magie noire truffé de symboles cabalistiques, caché sous un fatras de vieux almanachs, dans le cellier de la cuisine! Plus troublante encore, l’écriture sur les vieilles lettres de la femme de Peter, que ce dernier montrera peut-être aux PJ dans un moment d’auto apitoiement... elle ressemble bizarrement à celle de Lennie sur, par exemple, la liste des commissions. Mais comme la vieille a la tremblote, le doute est permis. Bref, quelques éléments très curieux, mais pas de preuve formelle !
Attention, Lennie n’aime pas que l’on fouille dans ses affaires. La brusque apparition de cette vieille femme aveugle mais silencieuse sur le pas de sa chambre, alors que l’orage éclate et que la pluie bat les carreaux, peut faire monter la tension d’un cran... (« Vous avez perdu quelque chose ? ») Les fiches d’état civil seront enco-re plus difficiles à consulter: il faudra pénétrer chez les Mc Gregor, ou soudoyer quelqu’un. Si les vampires y parviennent, ils s’apercevront qu’on ne trouve nulle trace de la mort de Lenna Mc Fulton. Cela devrait leur mettre la puce à l’oreille. A la limite, il est possible, après quelques jours, d’arracher quelques aveux à Peter Mc Fulton (qui est vraiment Lennie ?), mais il faudra pour cela faire montre d’une grande finesse psychologique.

Concluons

Tout cela risque de finir très mal Les pulsions de haine et de mort refoulées pendant trop d’années risquent de transformer la partie que jouent Peter, Lenna et Asgaard en véritable jeu de massacre. Les Pj peuvent n’être que spectateurs, ou partie prenante dans ce micro conflit aux implications dévastatrices. Quoi qu’il en soit, Villon s’abstiendra de juger les Pj à leur retour. D’Asgaard, ils pourront se faire un ami très cher ou un adversaire farouche, selon la tournure que prennent les événements. La description des PNJ (voir ci-dessous) aidera le conteur à donner du relief à une aventure somme toute tragique, mais ouverte. Un petit mot sur l’ambiance : les conditions climatiques peuvent jouer un rôle important. Nous sommes en hiver, il pleut presque en permanence et le vent souffle dans les cheminées avec un hululement sinistre et obstiné. Rien de tel pour égayer une petite soirée d’enquête.

Fabrice Colin
illustration: Rolland Barthelémy



CARACTERISTIQUES

Peter Mc Fulton

Age apparent : 25 ans, 9è génération.
« Créé par Asgaard sur ordre de Villon, il n’a pas reconnu son Sire quand il est arrivé à Strenway, car ce dernier a contrefait son apparence. Il est probable qu’il le craigne encore. Peter est moralement très vieux, rongé par le doute, le remords, la culpabilité, hanté par le souvenir de Lisbeth, qu’il aima passionnément, et le souvenir de sa femme avant qu’il ne la chasse, belle et innocente (même si jamais il n’en parle). Il se demande s’il n’aurait pas dû laisser mourir Lenna, ou lui donner la vie éternelle du temps de sa jeunesse, il n’aspire désormais qu’à la tranquillité, et fustigera quiconque s’en prendra à Lenna. Néanmoins, si on lui démontre que ses « visions » ont un rapport avec la vieille femme, il déclarera l’avoir toujours su, et entrera dans une colère noire, pouvant le mener à la frénésie. Physiquement, sa stature et son maintien sont impressionnants. De fines moustaches bordent ses lèvres sensuelles : il ne s’est jamais décidé à changer de style, et ressemble toujours à un jeune aristocrate londonien de 1805. Il est resté un romantique dans l’âme . Sa bibliothèque en atteste (Shelley, Byron, Chateaubriant, etc…)

Force 3, Dextérité 3, Vigueur 3
Charisme 4, Manipulation 2, Apparence 4
Perception 2, Intelligence 3, Astuce 2
Talents : Empathie 3, Intimidation 2, Vigilance 3, Esquive 1
Compétences : Etiquette 4, Armes à feu 3, Musique 3, Furtivité 2
Connaissances : Médecine 4, linguistique 3, Politique 3, Occultisme 1, Droit 2, Histoire (XIXè siècle) 5
Disciplines : Domination 3, Auspex 2, Présence 3 Conscience 4, Maîtrise de soi 3, Courage 2, Humanité 7, Volonté 5

Asgaard


Age apparent : 35 ans, 8è génération.
Cette figure clef de la cour de Villon a connu un passé mouvementé : né au Danemark en 1612, il s’est battu aux côtés du roi Frédéric III, puis déçu par les échecs militaires de son souverain s’est exilé en Allemagne puis en France, où il a fini par se ranger aux côtés du Prince de Paris. Un voile plane néanmoins sur l’histoire de sa transformation et sur les années qu’il passa en Allemagne, durant la terrible guerre de Trente Ans. Ce mystère lui confère une aura de puissance et il n’en est que plus respecté. C’est lui qui a insisté pour accompagner les Pj à Strenway ; Villon, qui connaît son lieutenant, sait que celui-ci obéit à ses ordres uniquement parce qu’il le veut bien. On pourrait le croire direct, franc, et fait d’une seule pièce, comme ses glorieux ancêtres vikings ; il est en réalité très renfermé, nerveux, irascible et difficile à cerner. Personne ne le connait vraiment. Il peut changer très rapidement de camp, guidé par son instinct, mais n’accorde sa confiance qu’excessivement rarement. C’est un géant blond aux yeux bleus glacés, qui maitrise parfaitement l’art du déguisement. Asgaard voue à Mc Fulton une haine mortelle car en 1810, ce dernier a refusé dde le suivre et de lui obéir, lui préférant la compagnie d’un Villon plus charismatique. Il se sert de Lennie, en qui il a immédiatement reconnu l’épouse de son ancien protégé, comme d’un subtil objet de vengeance, et se rend compte peu à peu que Lennie en fait autant avec lui. A ce moment-là, il est déjà trop tard.

Force 4, Dextérité 4, Vigueur 4
Charisme 4, Manipulation 3, Apparence 2
Perception 2, Intelligence 2, Astuce 3
Talents : Vigilance 4, Bagarre 4, Esquiver 4, Intimidation 3
Compétences : Pilotage 2, Animaux 3, Mêlée 4, Armes à feu 3, Sports 3
Connaissances : Investigation 3, Occultisme 3, Science 2, Médecine 2
Disciplines : Animalisme 3, Célérité 3, Domination 3
Conscience 2, Maîtrise de soi 2, Courage 5, Humanité 5, Volonté 7

Lenna Mc Fulton


Age apparent : 80 ans. Goule de Peter Mc Fulton.
Pratiquement aveugle, certes, mais dotée d’un sixième sens qui remplace avantageusement ses sens usés, Lennie ne survit que grâce au sang de Peter, mais lui-même dépend d’elle car elle assure sa subsistance. Physiquement, elle paraît inoffensive, même s’il émane d’elle une vague impression de malaise. C’est une vieille femme à moitié folle, rongée par un appétit de vengeance grotesque et démesuré. Tenace, patiente, déterminée et cruelle, elle mobilise toutes ses facultés dans le combat qui l’oppose à Mc Fulton et à tous ceux qui se placent en travers de son chemin. Si Peter vient à mourir – « The final death » -, elle-même mettra fin à ses jours. La bataille qu’elle livre en secret n’est que l’aboutissement d’une sorte de folie autodestructrice qui peut la mener aux pires exactions : elle voudrait qu’avec elle, noyée dans le souvenir de ces années déchirantes, disparaissent son époux, ses amis, et plus prosaïquement, le monde entier. Inutile de tenter de la raisonner, encore moins d’essayer de s’en faire une amie ; elle est certainement la moins humaine d’entre tous. Rappelons qu’elle a vieilli entre 1814 et 1866 car elle était privée du sang de Peter.

Force 2, Dextérité 1, Vigueur 1
Charisme 1, Manipulation 4, Apparence 1
Perception 3, Intelligence 3, Astuce 3
Talents : Comédie 3, Empathie 3, Intimidation 3
Compétences : Etiquette 2, Furtivité 4, Armes à feu 2
Connaissances : Occultisme 4, Médecine 3, Politique 3, Investigation 2
Disciplines : Spirit Thaumaturgy 4 (voir Player’s guide). Lenna a progressé dans la maîtrise de cette discipline grâce à laquelle il lui est possible de « créer » des fantômes, en invoquant les esprits de personnes disparues. Elle peut désormais l’utiliser jusqu’à deux ou trois fois par jour (il lui fallait beaucoup plus de temps par le passé).
Conscience 2, Maîtrise de soi 3, Courage 4, Humanité 2, Volonté 8


Les habitants du village sont des humains standard (le pasteur Jeanson est tout de même plus fort physiquement que la moyenne locale).