Casus Belli N° 17


Le « réalisme intégral » d'Amirauté (voir l'article de notre confrère Jeux & Stratégie n° 22) embrouille certains joueurs ou fait hésiter les amateurs potentiels.
Avec cette nouvelle série d'articles, Jean Ricard balaie les difficultés, éclaircit les coins obscurs, et même, bientôt, vous proposera quelques règles complémentaires « agréées par l'auteur ». De plus, il répondra aux questions des joueurs : n'hésitez pas à nous écrire...

Auteur : Paul Bois.
Editeur : Jeux Descartes.

Matériel nécessaire : Alors me-direz-vous, qu'est-ce qui vous séduit dans ce jeu ?

Tout, absolument tout. D'abord ce jeu, comme l’écrit Michel Brassinne, c'est le réalisme intégral. Tout y est pris en compte : la vitesse des navires, leur armement, leur blindage, la météo avec tout ce qui en découle : l'état de la mer, la couverture et le plafond nuageux, la force du vent, etc.
Et puis, il y a l'état d'esprit de l'auteur ; en effet il n'impose rien. Il conseille, il aide, il guide. Son livret n'est-il pas intitulé Amirauté ou propositions pour des jeux de guerre navale ?
Car effectivement, Amirauté n'est pas un jeu dont on se lasse au bout de quelques temps, qu'au bout de dix ou douze parties on connaît à fond et qui se voit remisé sur un coin d'étagère. C'est une suite de règles conçues pour jouer tous les jeux de guerre navale. Des règles que vous pouvez améliorer au fur et à mesure que des situations nouvelles apparaissent en cours de jeu.
Lorsque je demande à Paul Bois son avis sur une proposition en vue d'améliorer une partie des règles qu'il a établies, son visage s'épanouit.
Il est heureux que l'on suive l'esprit d'Amirauté ; car c'est cela qu'il a voulu réussir : donner aux joueurs une base solide constituée par un ensemble de règles simples, renforcées par l'utilisation de tableaux qui sont tout simplement des tables de calcul préétablies, le tout formant un ensemble cohérent, un outil de jeu incomparable.
Mais, et c'est là l'essentiel, tout ceci étant perfectible.

Modalités pratiques de jeu

Chaque camp dispose d'une carte identique et fait manœuvrer en secret l'ensemble de ses forces navales et aériennes. Le joueur trace la route de ses formations après qu'il ait indiqué à l'arbitre la vitesse des navires et celle des avions. Le rôle de l'arbitre, troisième personnage du jeu, est ici aussi important que celui du Maître de Jeu dans les jeux de rôle. En effet non seulement il préside à l'application des règles, mais il coordonne l'action en décidant de la durée fictive des séquences de temps. De plus, son action qui permet le secret du jeu, apporte un intérêt incomparable dans le déroulement de celui-ci. (Nous traiterons d'ailleurs en détails, du rôle de l'arbitre dans un prochain article).
Dès que l'arbitre constate qu'un groupe naval croise à portée de vue (ou de radar) la route de la force adverse, il avertit les deux camps.

Le combat tactique

A ce moment, les deux joueurs positionnent les figurines formant leur groupe naval respectif sur la carte tactique (voir matériel nécessaire).
Sur cette carte, les séquences de jeu sont obligatoirement de 5 minutes en temps fictif. Un navire filant à 33 nœuds parcourt 5 km en 5 minutes, il se déplace donc de -5 carreaux par phase de mouvement.

Parlons figurines !

Elles sont, à mon avis, indispensables car elles impriment au jeu ce sentiment du « réel » qu'affectionnent particulièrement ceux qui pratiquent Amirauté.
Dans un article paru dans le n° 22 de Jeux & Stratégie, Michel Brassinne écrit :

« Beaucoup d'amateurs n'ont ni le temps, ni le goût, ni les finances nécessaires à l'achat et à la décoration de somptueuses figurines en plomb-étain représentant cuirassés et porte-avions ».
Personnellement, je n'ai pas perdu beaucoup de temps pour peindre mes navires, En une soirée j'ai peint la totalité des flottes japonaises et américaines (et pourtant cela représente bien environ 80 bâtiments).
J'ai tout simplement peint tous les navires japonais en vert foncé et les américains en gris. Ce qui me donne toute satisfaction n'étant pas un fanatique de la décoration des figurines.
Question finances, on peut s'arranger. Avec un peu d'astuce le problème sera résolu à moindres frais. Il existe, en effet, plusieurs solutions permettant de limiter la dépense. Soit chaque camp n'achète que les navires du pays de son choix. Soit vous n'achetez que les figurines absolument indispensables et polyvalentes. C'est-à-dire acquérir des navires qui seront employés dans le plus grand nombre de thèmes de jeux utilisés.
Prenons par exemple un joueur d'Amirauté décidé à commander les figurines des navires allemands de la deuxième guerre mondiale. Il pourra commander :

4 cuirassés (Bismarck, Ad. Scheer, Scharnhorst, Gneisenau).
1 croiseur (Hipper).
10 destroyers (type Maas ou Narvik).

Il faut souligner que les destroyers vendus par pochettes de 2 unités ne représentent donc que l'achat de 5 pochettes. C'est donc au total 10 pochettes que notre joueur devra acquérir. Soit une dépense d'environ 150 F.
Il est bon aussi de préciser que les destroyers peuvent servir dans des jeux concernant les forces italiennes ou japonaises ; rien ne ressemblant plus à un destroyer (surtout à cette échelle) qu'un autre destroyer.
Pour les gros bâtiments, le Bismarck s'identifie au Tirpitz. L'Admiral Scheer at Lutzow,et au Graf von Spee, le Hipper au Blücher ou au Prinz Eugen.

DÉROULEMENT DU JEU :

Pour un combat naval
  1. Les joueurs déplacent leurs navires.
  2. Le parti A fait tirer son artillerie er éventuellement lâche ses torpilles.
  3. L'arbitre évalue les résultats des coups au but sur les bateaux de B.
    Les navires atteints sont immédiatement diminués en artillerie et vitesse, proportionnellement aux dommages enregistrés.
  4. Le parti B tire à son tour et envoie ses torpilles s'il y a lieu.
  5. L'arbitre procède comme ci-dessus (3).
Voici l'exemple le plus simple à jouer :

La bataille du Rio de la Plata du l3 décembre 1939, entre un cuirassé de poche allemand et trois croiseurs britanniques.
Placement historique des navires (en début de partie) :



Le cuirassé allemand dont l'artillerie est de portée supérieure à celle des croiseurs anglais ouvre le feu en premier. Il annonce :
« 6 h 30, à 20.000 m le Graf von Spee tire avec 6 x 280. Objectif : Exeter ».
L'arbitre à l'aide de l'annexe n° 7 détermine le % de chance de tir au but.



Il repère la colonne correspondante à la portée des canons de 280, soit 42000 m. Puis dans cette colonne, il repère la distance de tir. L'Exeter est un croiseur de T2 (taille 2) dont la vitesse est à ce moment de 25 nœuds, Le % de chance est donc de 26 %.
L'arbitre sort un pion loto (pion n° 18) et annonce : « Salve au but, objectif atteint ». Il tire un autre pion loto qui détermine le nombre d'obus portants dans la salve tirée touchante.
Soit le pion tiré portant le n° 70, le tableau de l'annexe n° 9 indique que 5 obus ont touché.



Evaluation des dommages subis :

Cinq obus ayant touché, l'arbitre lance 5 dés qui donnent respectivement : 2-3-3-4-5.

En consultant l'annexe 10 on détermine l’ensemble des dégâts soit : 8 points d'agression.



Evaluation des dégâts :

L'Exeter est un croiseur valant 22 points, ayant subi 8 points de dégâts.
L'arbitre informe les joueurs, ou le joueur du camp britannique que son artillerie a perdu :

2 pièces de 203 (sur 6)
2 canons de DCA (sur 6)
2 tubes Torp. (sur 6).

D'autre part, sa vitesse est réduite à 20 nœuds (alors qu'elle était de 32).
Par contre le joueur du camp allemand n'est pas informé de l'étendue des avaries subies par l'Exeter. Il les constate simplement par la suite en observant la vitesse réduite et la diminution de l'intensité du tir de son adversaire.
Dans un prochain article nous traiterons toutes les questions se rapportant à l'aviation.
Ayant joué plusieurs campagnes du Pacifique nous avons jugé nécessaire d'apporter un complément aux règles figurant dans Amirauté. Il est évident que, dès que sont abordés ces théâtres d'opérations, le rôle de l'aviation devient primordial. D'où nécessité de construire des règles simples, facilement assimilables, mais complètes, permettant aux wargamers d'utiliser au maximum les ressources apportées par le facteur aérien.

Histoire de vous garder en haleine, voici encore quelques têtes de chapitres que nous traiterons dans les numéros à venir : Bien sûr, nous répondrons aux questions et problèmes que vous rencontrerez en cours de partie. Pour cela, adressez votre courrier à Casus Belli, rubrique Amirauté, 5, rue de la Baume, 75008 Paris.

Jean Ricard