Cette aventure est prévue pour un groupe de 4 ou 5 voyageurs débutants
ou moyennement expérimentés, possédant au moins un haut-rêvant.
LE SUJET
« Chrysobelle » est le nom d’un bateau condamné à être détruit par la
tempête, et, dans un autre rêve, le nom d’une haut-rêvante condamnée à
être lynchée par des villageois. Dans la « réalité », les voyageurs se
trouvent à bord du bateau, mais tous vont faire le même rêve. Ils vont
se retrouver dans le village qui en veut à la haut-rêvante. S’ils
comprennent l’analogie et sauvent Chrysobelle, ils sauveront en même
temps leur bateau. S’ils ne comprennent pas ou s’ils échouent, ils
couleront corps et bien.
INTRODUCTION
Les voyageurs se sont embarqués pour une traversée de quelques jours à
bord de la Chrysobelle, un petit vaisseau gréé de voiles carrées, du
genre caravelle. Commandé par le capitaine Parrote, l’équipage comprend
8 hommes. Les passagers logent dans une cabine située sous le château
arrière. Le scénario commence véritablement au matin du second jour de
la traversée. Les voyageurs se réveillent avec le souvenir d’avoir fait
un rêve très particulier, non pas tant à cause de son contenu que de
l’impression significative qu’ils en conservent. Par ailleurs, tous ont
fait le même.
LE RÊVE
Le rêveur est assis à une table dans ce qui semble être une vaste salle
d’auberge baignant dans une lumière ambrée. De fait, les petits
carreaux des fenêtres sont tous constitués de verre jaune. La salle est
propre et silencieuse. Les tables de bois ciré luisent dans la pénombre
jaune, le sol dallé est recouvert de nattes de joncs. Le rêveur peut
apercevoir les autres voyageurs, assis à proximité. Il n’y a pas
d’autres clients, mais deux hommes se tiennent devant lui. Le premier,
petit et bedonnant, sanglé d’un tablier de toile grise, est
manifestement l’aubergiste ; l’autre est un grand gaillard vêtu de cuir
sombre, botté, portant l’épée au côté. Il n’a pas un seul cheveu et la
peau de son crâne comme celle de son visage est striée de multiples
cicatrices. L’aubergiste entame une courbette puis demande : «Peut-on
savoir d’où vous venez, messire ?» Question qui embarrasse grandement
le rêveur. «Eh bien, répondez !» demande l’homme chauve à son tour.
Alors, se sentant de plus en plus gagné par le malaise, le rêveur
s’entend répondre : «De nulle part, je rêve ...» Puis tout semble
s’immobiliser sur cette réponse. Le reste du rêve est flou, jusqu’au
réveil, et le rêveur n’arrive à se rappeler que cette unique séquence.
LA TEMPÊTE
Le bateau est maintenant en pleine mer. Vers la mi journée, le ciel se
couvre, un vent violent déchaîne de hautes vagues, la visibilité
devient nulle, c’est la tempête... Au Gardien des Rêves de faire jouer
l’épisode de façon plus ou moins détaillée, mais quoi que les joueurs
fassent, ils n’ont aucune chance. Impossible de fuir, impossible de
nager, impossible, dans le déchaînement des éléments, de se concentrer
suffisamment pour monter dans les TMR. Molestés d’une façon ou d’une
autre, les voyageurs perdront conscience les uns après les autres…
- pour se retrouver dans la salle d’auberge éclairée de jaune, la salle
d’auberge de leur rêve. Physiquement, ils seront exactement dans le
même état qu’au réveil au début de la journée, mêmes points d’endurance
et de rêve. Ils porteront tout leur équipement. Mais tout ce qui se
sera produit ou aura été fait durant la journée, y compris la mise en
réserve de sorts, sera comme gommé. De fait, la tempête et son échéance
sont maintenant mis entre parenthèses. Les voyageurs vont poursuivre
leur rêve de la nuit, et de la façon dont ils agiront dépendra leur
survie à bord du bateau.
OMEN
Omen est un petit village à l’intersection de routes marchandes. Il
doit son existence à un vieux pont fortifié, seul moyen de traverser la
rivière Ystar dans les environs. Les agglomérations les plus proches,
au nord, au sud, ou au-delà de la forêt, sont à deux ou trois jours de
marche. Omen a donc une vocation commerciale, et c’est ce qui explique
la présence d’une grande auberge : l’Auberge du Pont d’Omen [A]. Hormis
cela, le village est minuscule et surtout agricole. Les principales
maisons sont celles du chef du village, Wortex [W], du forgeron [F], du
meunier [M], et du charron [CH]. Les autres localisations sont : les
cultivateurs [C], les granges [G], les étables [E], et les pêcheurs
[P]. Le pont est gardé par six villageois sous la responsabilité de
Wortex, chargés d’encaisser les péages : 3 PE par jambe et par roue.
Ainsi un tombereau (2 roues) tiré par une mule (4 jambes), accompagnée
de trois personnes (6 jambes) et d’une zyglute (3 jambes), devront
s’acquitter d’un droit de 45 PE (dans un sens comme dans l’autre). Les
gardes, vêtus de cuir et casqués, sont armés de lances et d’arbalètes ;
mais en vérité, il n’y a jamais d’incident au pont.
Sauf que, et c’est ce qui motive toute cette histoire, voilà plusieurs
mois qu’Omen n’a eu la visite d’aucun voyageur ni d’aucun marchand.
Plus personne ne voyage sur les routes, plus personne n’emprunte le
pont. La raison exacte d’un tel abandon est laissée à l’imagination de
chaque Gardien des Rêves. La seule chose qui soit importante ici, c’est
la réaction des villageois. Dans leur malaise grandissant, à défaut
d’une explication, il leur faut un responsable. Et comme il y a une
haut-rêvante qui vit à proximité, la responsable est toute trouvée. Nul
doute que c’est elle « qui déchire le rêve, qui éloigne les voyageurs
avec ses manipulations draconiques...» Les villageois n’ont aucune
accusation rationnelle à fournir. Comme nombre de sédentaires, ils se
méfient des haut-rêvants ; et cette méfiance peut vite tourner à la
haine. L’arrivée des voyageurs va tout déclencher.
L’ARRIVEE
Comme dans leur rêve, l’aubergiste et l’homme chauve couvert de
cicatrices seront en face des voyageurs. Ce dernier s’appelle Wortex et
c’est le chef du village. Comme dans leur rêve, l’aubergiste demandera
: « Peut-on savoir d’où vous venez, messires ? » Et Wortex
insistera pour avoir une réponse.
Apparemment, personne ne les a vus franchir le pont ni entrer dans le
village. Logiquement, les voyageurs devraient avoir la même difficulté
à répondre, et quoi qu’ils disent, cela déclenchera la colère de
Wortex.
S’ils répondent qu’ils l’ignorent et qu’ils rêvent, Wortex dira :
« Pas de doute, c’est la Chrysobelle ! Voilà maintenant qu’elle
s’en prend à d’innocents voyageurs !... » S’ils répondent qu’ils
supposent avoir franchi une déchirure du rêve (peut-être à cause de la
lumière jaune), même réaction de Wortex. S’ils vont plus loin dans la «
vérité » et parlent de leur naufrage, la réaction sera d’autant plus
forte que sera mentionné le nom de Chrysobelle. Car ce nom sera tôt ou
tard mentionné, soit par les voyageurs parlant de leur bateau, soit par
Wortex parlant de la haut-rêvante. Pour Wortex, la culpabilité de la
haut-rêvante n’en sera que plus établie. Pour les voyageurs, ce sera le
moment de comprendre l’analogie et la signification de leur rêve. Ils
pourront être aidés dans ce sens par la façon dont Wortex parle de la
haut-rêvante. Il ne dit pas Chrysobelle, mais la Chrysobelle.
En définitive, les voyageurs pourront apprendre où ils sont, de même
qu’un résumé des coutumes et événements locaux. En ce qui concerne
Chrysobelle, ils leur faudra poser beaucoup de questions pour obtenir
de véritables renseignements autres que des imprécations. Ils pourront
finalement apprendre que c’est une femme d’une quarantaine d’années qui
vit à l’écart du village. Elle est arrivée par la route nord il y a
environ dix ans. Elle n’a fait aucun mystère sur sa qualité de
haut-rêvante. Mais elle a prétendu qu’elle était fatiguée du voyage et
que si on l’accueillait au village, elle pourrait se montrer utile, ne
serait-ce que pour soigner les malades et les blessés. Les villageois
lui ont dit de s’installer dans une maison en ruine à l’écart du
village, au bord du marais. Parce qu’on ne sait jamais, même s’ils
semblent animés de bonnes intentions, vaut mieux pas que les
haut-rêvants soient trop près... En échange de soins, ils l’ont aidée à
retaper la maison. Et depuis, elle y vit seule, sans jamais voir
personne, sauf les villageois qui viennent la trouver pour être
soignés.
« Elle fait semblant d’être bonne, conclura Wortex, mais les
haut-rêvants bons, ça n’existe pas ! Ça ne peut s’empêcher de répandre
sa malice et de jouer des tours aux innocents avec leurs sortilèges
draconics. Et vous en êtes la preuve, vous, ses dernières victimes.
Mais rassurez-vous, elle a été trop loin cette fois, la Chrysobelle !
Avant le coucher du soleil, elle aura cessé de nuire, définitivement… »
Les voyageurs pourront alors apprendre le sort qui lui est réservé, le
même qu’Omen réserve à tous ses criminels (en réalité rarissimes). Elle
sera liée dans un sac, sur le pont, puis après une sévère bastonnade,
jetée à la rivière. Puis Wortex s’en ira rassembler les villageois les
plus courageux pour l’expédition punitive. Avant de quitter l’auberge,
il dira aux voyageurs qu’ils sont libres de leurs mouvements, mais
qu’il leur conseille fortement de ne pas quitter le village.
L’aubergiste sera naturellement prêt à les loger : 3FB pour un repas
moyen et 2PB par lit (l’auberge est confortable et la nourriture,
quoique simple, est bonne). Si les voyageurs veulent franchir le pont,
ils devront néanmoins s’acquitter du péage.
QUELQUES REFLEXIONS
Les joueurs ne manqueront pas de se poser des questions et de trouver
tout cela étrange. En premier lieu, comment sont-ils arrivés là ? Par
une déchirure du rêve aboutissant dans la salle d’auberge ? Ou bien,
les villageois ayant raison, de par un sortilège de Chrysobelle ? La
première hypothèse doit être éliminée. Si la tempête les avait fait
changer de rêve, ils devraient arriver dans celui-ci trempés et
épuisés. Or ils sont en pleine forme. Et puis il y a le rêve. Tout
s’est déroulé au début de la même façon que dans leur rêve, ce rêve si
étrangement lourd de sens. Comme si on reprenait le film au départ,
comme si ce rêve, ils le poursuivaient maintenant. D’où ils peuvent
conclure qu’actuellement, ils rêvent... Ce qui expliquerait leur
arrivée mystérieuse. Mais s’ils rêvent, cela signifie-t-il que, dans la
« réalité », ils sont toujours à bord de la Chrysobelle en pleine
tempête ? Oui et non. Car, s’ils s’en souviennent bien, leur rêve a eu
lieu (a lieu) avant la tempête.
Il y a aussi l’hypothèse inverse, la « réalité » étant maintenant et le
« rêve » étant la tempête. Mais en bon personnages de Rêve de Dragon,
il devraient savoir que rêve et réalité ne sont qu’une même chose :
tous les rêves sont vrais. Une chose au moins est sure : la Chrysobelle
est en danger. Le bateau court au naufrage, et la haut-rêvante risque
d’être battue et noyée. Or n’est-ce pas la même chose ? Et si le destin
de la haut-rêvante leur est indifférent, en est-il de même de celui du
bateau ? Et puisque les deux rêves s’entrecroisent et sont vrais tous
les deux, ne serait-il pas ingénieux de venir au secours de la
Chrysobelle haut-rêvante, faute de pouvoir faire quelque chose pour la
Chrysobelle bateau ? En sauvant l’une, ne sauvera-t-on pas l’autre ?
Telle est peut-être la signification du rêve. Explication complètement
irrationnelle, mais tout à fait onirique — et c’est ce qui importe.
AGIR
L’arrivée des voyageurs aura lieu vers le milieu de l’heure de la
Couronne. Le temps des explications, c’est vers la fin de cette heure
(ou début Dragon) que Wortex ira rassembler ses hommes. L’expédition
punitive sera prête à partir au début de l’heure des Épées. Les
voyageurs ont donc tout juste une heure pour prendre des décisions et
agir.
En interrogeant les villageois, ils peuvent facilement se faire décrire
le chemin à suivre pour aller chez Chrysobelle : traverser le pont,
aller du côté des pêcheurs, prendre le petit sentier vers le sud-
ouest. Le chemin commence par serpenter dans les collines, puis rejoint
la rive du marais du Grand Vaseux qu’il longe ensuite jusqu’à la
vieille maison. Environ 6 kilomètres qui peuvent s’effectuer sans
traîner en une demi-heure draconique (60’).
Quoiqu’il se montre amical envers les voyageurs, Wortex n’a aucune
confiance en eux. Ils peuvent fort bien être des victimes de la
Chrysobelle, mais tout autant des créatures invoquées par elle dans il
ne sait quel but mystérieux mais forcément mauvais. C’est la raison
pour laquelle il leur a fortement conseillé de ne pas quitter le
village. Par ailleurs, avant même de rassembler l’expédition, il
demandera à trois des gardes désœuvrés du pont de surveiller leurs
faits et gestes. Et si les voyageurs prennent le chemin de chez
Chrysobelle, de les arrêter coûte que coûte dès qu’ils seront sortis du
village. Ordre est donné d’éviter de les tuer, mais de les faire
prisonniers si possible.
Les trois hommes ne seront pas excessivement discrets. Les voyageurs
devraient donc repérer leur surveillance. À eux ensuite d’être
suffisamment habiles pour la déjouer. Dans le cas contraire, il risque
d’y avoir combat (les jets de Discrétion et Perception sont à décider
par le Gardien des Rêves en fonction des circonstances).
En ce qui concerne le marais du Grand Vaseux, les villageois pourront
expliquer qu’il doit son nom à une créature qui est censée le hanter :
une sorte de monstrueux géant né de la boue même du marais. Si les
personnages n’ont encore jamais rencontré de Vaseux, ils peuvent avoir
une idée de cette Entité de Cauchemar Pleinement Incarnée en bons
personnages de Rêve de Dragon, ils devraient réussissant
INTELLECT/Légendes à 0.
LA MAISON
Comme décrite sur le plan, la maison n’est pas très grande et n’a
qu’une seule pièce avec des poutres apparentes montrant le toit en
chaume. Sous la poutre faîtière, la hauteur est de 3 mètres. Le sol est
en terre battue. Les fenêtres n’ont pas de carreaux, rien que des
volets. Les portes n’ont pas de serrure et ferment par des loquets. Le
corps principal se tient juste au bord d’une dénivellation abrupte, une
mini-falaise de 3 mètres de haut. Une véranda de poutres et de
planches, supportée par des poteaux, surplombe ce vide. Elle est
couverte par un auvent, prolongement du toit. Pour atteindre le bord du
marais, le meilleur moyen est d’utiliser l’escalier de la véranda ou le
raidillon un peu plus loin. Le jardin est essentiellement potager. Près
du marais, Chrysobelle a tenté de cultiver un petit carré d’ortigal.
Mais malgré tous ses soins, l’herbe ne donne qu’un bonus de +3 (environ
60 brins sont actuellement à maturité).
Derrière la maison, au nord, le flanc de la colline remonte
graduellement, planté d’arbres, noisetiers, bouleaux, et de buissons et
fourrés assez denses. La butte est un gros rocher de granite couvert de
mousse, de 4 m de haut (à peu près la hauteur de la maison).
Chrysobelle n’est pas riche. Sa maison ne contient que des objets de
ménage très usuels. Ses seules valeurs sont contenues dans le coffre
(sans serrure) : vêtements de rechange, une bourse de 18 PA et 32 PB, 3
fioles de Liqueur de Bagdol, 1 fiole d’Huile de Sélikanthe et 1 petit
pot de Tournegraisse, et un rouleau de parchemins draconics. Les
formules, toutes de difficulté –3, sont celles de tous les sorts et
rituels qu’elle connaît (sans aucun bonus).
CHRYSOBELLE
La haut-rêvante est une femme de 40 ans, aux cheveux blonds cendrés
avec des yeux bleus, encore assez belle, physiquement musclée par ses
années de voyage. Elle vit seule dans la maison en compagnie de ses 5
chats. Sans être véritablement insociable, elle n’aime vraiment que la
solitude. En fait, sa situation à l’écart lui convient très bien. Elle
accueillera les voyageurs sans démonstrations excessives. On pourra
même la trouver un peu froide. Elle s’enquerra de leur présence si
nombreux à la fois.
Sa réaction sera un mélange d’indifférence et d’incrédulité. « Je
soigne gratuitement leurs blessés et leurs malades depuis dix ans !
dira-t-elle. Ils ne vont pas se mettre à croire maintenant que je leur
veux du mal… » Pour la convaincre, il faudra réussir un jet d’ELOQUENCE
(+ Discours facultativement) à –4. (En cas d’échec, chaque nouvel essai
est avec un malus de –1 même s’il est tenté par une autre personne).
Si personne ne peut la convaincre, elle dira :
« Attendons qu’ils viennent et qu’ils s’expliquent… » Aux voyageurs de
voir comment ils peuvent la sauver malgré elle. Si elle est convaincue,
elle dira : « Vite ! A la barque ! Aidez-moi à la mettre à l’eau. Ils
n’oseront jamais me poursuivre à travers les marais du Grand Vaseux
!...» Et devenant un peu plus loquace, elle pourra mentionner que
Wortex a souvent, et vainement, tenté de la séduire - ce qui donnera un
nouvel éclairage au comportement du chef du village.
Si les voyageurs objectent la présence du Grand Vaseux dans les marais,
elle dira : « C’est un risque à courir, je ne vous oblige pas à
m’accompagner. » Elle ajoutera cependant : « Mais au point où vous en
êtes, vous êtes les bienvenus. La barque est assez grande pou nous
tous ». Et rien ne pourra la faire changer d’idée.
ALTERNATIVES
Le déroulement exact des événements dépendra des choix et actions des
voyageurs, mais pour aboutir finalement à deux grandes alternatives :
soit ils sauvent Chrysobelle, soit ils ne la sauvent pas. La meilleure
solution consisterait à persuader Chrysobelle de fuir, non pas dans le
marais du Grand Vaseux, mais vers l’ouest à travers les collines. Le
problème est que la haut-rêvante n’acceptera jamais cette solution.
Pour son bien, il faudra l’y convaincre de force, magiquement ou non.
Si les voyageurs ne tentent rien du tout, l’expédition punitive
reviendra en fin de journée avec Chrysobelle prisonnière. Elle sera
incarcérée dans l’une des tours du pont, ce dernier étant momentanément
fermé à la circulation. Les voyageurs auront encore l’option de tenter
de la délivrer. Mais, exhorté par les discours haineux de Wortex, tout
le village sera contre elle, et les voyageurs auront bien du fil à
retordre. En cas d’échec, elle sera exécutée le lendemain à l’aube,
battue et noyée.
Si, Chrysobelle n’étant pas convaincue, les voyageurs restent avec elle
pour la défendre, il leur faudra livrer combat contre Wortex et son
expédition. S’ils perdent ce combat, les survivants seront ramenés
prisonniers à Omen, et l’on en reviendra au cas précédent, sauf que la
libération de Chrysobelle deviendra quasiment impossible. S’ils gagnent
le combat, Chrysobelle étant maintenant convaincue, elle décidera de
fuir par les marais, craignant une seconde expédition vengeresse. Là
encore, elle objectera que le Grand Vaseux est un risque à courir, mais
qu’au moins personne n’osera l’y poursuivre.
LE GRAND VASEUX
En toute logique onirique, les voyageurs devraient répugner à confier «
à nouveau » leur salut à un bateau. Et de fait, le Grand Vaseux est là,
dans les marais, pour symboliser l’extrême fureur de la tempête. S’ils
laissent Chrysobelle partir seule, autrement dit l’abandonnent à son
destin, ils verront sa barque disparaître parmi les roseaux ; puis,
dans le lointain, à peine perceptible dans la brume, surgira une forme
énorme et monstrueuse, suivie par un grand cri et... plus rien. La
Chrysobelle aura coulé et ils auront échoué.
S’ils l’accompagnent dans la barque, le Grand Vaseux surgira
pareillement. La différence, c’est que les voyageurs auront encore la
possibilité de sauver Chrysobelle (et eux-mêmes) en combattant le
monstre. L’entité prendra soudainement naissance sous la barque alors
que le groupe naviguera en eau peu profonde entre des lagunes de sable
clairsemées de roseaux. L’embarcation sera soulevée hors de l’eau, où
elle retombera lourdement dans des gerbes d’éclaboussures. Tous les
passagers devront réussir un jet d’AGILITÉ à -2 ou être projetés par
dessus bord, dans l’eau heureusement peu profonde (50 cm). Ce n’est
qu’au round suivant que l’entité se dressera véritablement et
commencera à s’en prendre aux personnages eux mêmes, la barque étant
quant à elle complètement immobilisée, envasée.
FINS DU RÊVE
Si les voyageurs réussissent à emmener Chrysobelle dans les collines
avec au moins 30 minutes d’avance sur les poursuivants éventuels
(Wortex et ses hommes, seconde expédition vengeresse), la fuite
réussira automatiquement et les voyageurs auront gagné. S’ils doivent
libérer la haut-rêvante de son emprisonnement à Omen, il suffira
pareillement qu’ils aient au moins 30 minutes d’avance sur d’éventuels
poursuivants pour réussir, quelle que soit dans ce cas la route qu’ils
empruntent. Si, ayant fui les marais, ils triomphent du Grand Vaseux,
ils auront pareillement gagné.
Dans tous les cas où la haut-rêvante sera ainsi sauvée, elle leur dira
: « Je ne sais comment vous remercier de ce que vous avez fait pour
moi… » Puis elle les regardera avec un grand sourire et son visage
s’immobilisera, cependant que tout cessera pareillement de bouger
autour d’elle, comme un film arrêté. Les voyageurs entendront alors
sonner une cloche, et ils ouvriront les yeux, réveillés. Ils
comprendront qu’ils viennent d’entendre la cloche du navire et qu’ils
sont toujours à bord de la Chrysobelle, dans leurs couchettes. C’est le
matin et tout ceci n’était qu’un rêve, le même rêve que précédemment,
sauf que cette fois-ci, ils l’ont rêvé en entier.
Physiquement, ils seront dans le même état qu’au tout début du
scénario, sans blessures, à fond d’endurance, quoi qu’ils aient «
dépensé » dans leur rêve. Inversement, rien de ce qui aura pu être
acquis au cours du rêve n’existera, sauf l’expérience gagnée et les
points de stress.
Au Gardien des Rêves de faire ensuite en sorte que tout se poursuive
avec une impression de déjà vécu, mêmes réflexions des matelots le
matin, même gestes du capitaine, etc. Toutefois, vers midi, alors que
le capitaine montrera le lointain en disant « J’ai bien peur qu’on
essuie un sacré coup de vent… », la vigie s’écriera : « Naufragée à
bâbord ! »
Il y effectivement une barque qui dérive, avec, à bord, une femme
blonde d’une quarantaine d’années et cinq chats terrorisés par les
vagues.
Coïncidence, la naufragée prétendra s’appeler Chrysobelle. Quand elle
verra les voyageurs, elle dira : « II me semble vous connaître ! J’ai
rêvé de vous. J’ai rêvé que votre présence me sauvait la vie, et sans
cette certitude, je serais certainement déjà morte de désespoir, car je
ne sais vraiment pas ce que je fais en pleine mer. Mais je vois que mon
rêve était prémonitoire, j’avais raison de croire en vous, et je ne
sais comment vous remercier… » Cependant, le capitaine s’écriera : « La
tempête s’éloigne. Le proverbe a raison de dire que cela porte toujours
bonheur de sauver un naufragé !... » Et de fait, l’ouragan s’éloignera
à l’horizon, laissant la Chrysobelle continuer paisiblement son voyage.
Quant à la haut-rêvante, elle pourra devenir l’amie des voyageurs,
voire des hauts-rêvants du groupe en les faisants profiter des foemules
draconiques que contient sa besace.
Si par contre les voyageurs échouent, la fin sera malheureusement
différente. Au moment de la mort de la haut-rêvante, soit tuée en
combat, soit noyée par les villageois, soit écrasée par le Grand
Vaseux, les voyageurs verront pareillement les choses s’immobiliser
autour d’eux comme un film arrêté, et seront pareillement réveillés par
la cloche du navire. La différence, c’est que le Gardien des Rêves leur
dira : « Voilà. Nous étions légèrement revenus en arrière pour vous
permettre de vivre réellement votre rêve significatif. Malheureusement,
le rêve le prouve, la Chrysobelle ne peut pas être sauvée. Quand
surviendra la tempête, il n’y aura effectivement rien à faire. Tout
périra corps et bien. Inutile maintenant de continuer puisque cela a
déjà été joué. »
NOTE. Si un personnage meurt au cours de l’aventure, sa mort non plus
ne sera pas réelle. Pour ses compagnons restés dans le rêve d’Omen, il
semblera effectivement mort, mais lui se réveillera en fait de son rêve
à bord du bateau en entendant la cloche du matin. Toutefois, pour
l’annoncer au joueur, le Gardien des Rêves devra attendre que tous
aient terminé leur rêve, heureusement ou malheureusement, et se soient
réveillés.
Ce scénario pour « Rêve de Dragon » a été joué au défi
Richard le Noir les 22 - 23 octobre.
Caractéristiques des Personnages non joueurs
LES CHATS.
Les 5 chats de Chrysobelle sont des animaux familiers ni
particulièrement coopératifs ni agressifs. En cas de combat, ils
chercheront à se cacher. Si Chrysobelle fuit dans les marais, ils
sauteront dans la barque, croyant qu’elle va simplement à la pêche. Si
la fuite a lieu dans les collines, ils resteront à la maison. En cas de
besoin, utiliser les caractéristiques moyennes du Félorn, moins les
ailes et le don de parole.
Le Vaseux
TAILLE 28 Endurance 50 Vitesse 12/-
RÊVE 22 +dom +10
Protection : Jet de rêve de l’attaquant à –4
Tentacule 25 niv +4 init 16 +dom (d4 +10)
Esquive 7 niv +4
Voir les règles sur le vaseux, livre I page 78.
Chrysobelle, née à l’heure du Dragon, 40 ans, 1m 70, 68
kg, cheveux blonds, yeux bleus.
Discours, Discrétion 0; Escalade, Saut, Se cacher, Course +3; Srv en
Extérieur , collines +5; Équitation +4; Srv en Marais, Armurerie 0;
Natation +2; Légendes -5; Lire & écrire -2
Wortex porte en permanence son épée sorde et sa dague, mais pas son
bouclier. Il ne le prendra que pour l’expédition. Ce n’est pas tant
Chrysobelle qu’il redoute que les créatures monstrueuses qu’elle est
certainement capable d’invoquer.
Omen n’a pas de milice fixe. Tous les villageois adultes doivent garder
le pont à tour de rôle et, sous la férule de Wortex, sont entraînés
(très moyennement) à manier les armes.
Ces caractéristiques correspondent aux villageois les plus aptes à se
battre, ceux que Wortex choisira pour son expédition punitive. Les 3
villageois chargés de surveiller les voyageurs ne seront armés que de
lances, dagues et arbalètes, ceux de l’expédition auront des boucliers
et le reste des arbalètes disponibles. Il n’y a en tout que 6 arbalètes
au village