Il convient d'abord de faire un sort définitif à la "roulotte" utilisée
par les questeurs pour sillonner les routes de France.
Le terme générique "roulotte", s'il a été retenu pour la
rédaction des règles de Hurlements, le jeu de l'Initié, est à
considérer ici dans son acceptation la plus large; il désigne alors
tous les types de chariots qui composent la caravane, du chariot à
provisions à celui du matériel, en passant par les chariots
"personnels"... Pourtant, nous nous sommes aperçus que l'appellation
"roulotte" induisait de nombreux joueurs en erreur, notamment par la
fréquente association d'idées qui s'établit entre la roulotte et
l'habitation des gitans.
Dans la présente aide de jeu, nous nous attacherons à décrire
essentiellement des roulottes médiévales (des chariots tels qu'on en
voit apparaître dès le XIe siècle).
Autant en finir tout de suite avec cette idée fausse; au
Moyen-Âge, il n'y a pas de gitans, et les roulottes de la caravane ne
sont pas des "maisons à roues". Tout au plus peut-on considérer que ce
sont des larges chariots non habitables.
Mais alors, à quoi ressemblent ces "roulottes" ?
La caravane est composée d'une succession de chariots de bois, à quatre
roues, tirés par des bœufs...
Tous ces véhicules, qu'ils soient utilisés pour le transport de
passagers ou de matériel, sont bâchés. Ici encore, un malentendu doit
être dissipé; les chariots bâchés du Moyen-Âge ont peu de rapport avec
leurs homologues américains qui s'illustrèrent lors de la conquête de
l'Ouest. Les bâches médiévales sont de larges pièces de tissus
rectangulaires cousues "au carré" et assemblées sur de hautes
structures de bois (voir illustration). Les tentures latérales peuvent
être relevées et permettent une très large vision panoramique.
Ces chariots "confortables" sont réservés au transport de
passagers. On y range ses effets personnels dans de gros coffres de
bois. Les questeurs se regroupent ainsi en familles, en couples ou tout
simplement par états (les chevaliers aimant à se retrouver entre eux,
pour approfondir leur connaissance des Royaumes...).
Chacun dispose librement de son espace dans le chariot, qu'il
aménage à sa guise. On trouve ainsi les coffres à vêtements, de petits
coffrets à bijoux et breloques, de larges couvertures de laine pliées
ou roulées puis serrées dans des cordelettes, de rares outils, de
petits tonnelets d'eau ou de vin et tous les effets nécessaires au
quotidien...
Contrairement aux chariots "modernes", on n'installe rien sous les
véhicules (à moins de vouloir dissimuler quelque chose).
Par contre, dans un souci de gain de place, on peut équiper les
côtés des roulottes, en y fixant longs coffres et tonneaux. On y stocke
l'eau - essentielle - et divers outils, l'intérieur du chariot étant
réservé au confort personnel.
Les provisions et équipements communs sont transportés dans
des chariots plus simples; les sacs de grains ou de farine, les
tonneaux de denrées ou de boissons sont directement recouverts d'une
large pièce d'étoffe tendue qui les protège du vent ou du soleil.
La composition de la caravane est la suivante : on dénombre
cinq chariots de matériel et de provisions et une quinzaine de
"roulottes".
Tous ces véhicules sont tirés des bœufs, plus rarement par des
mules et quasiment jamais par des chevaux. De ce fait, le déplacement
est assez lent: si un cavalier peut espérer couvrir plus de cinquante
kilomètres en une journée, la caravane, pour sa part, se contente en
moyenne de quinze à vingt kilomètres journaliers.
Chevaux et bœufs sont, en tout cas, tous soigneusement ferrés.
De même, on commence à renforcer les roues des chariots en les
"ferrant" elles aussi (voir l'illustration).
Au XIe siècle, la roue, jusqu'alors constituée d'un disque de
bois plein, laisse la place à une version plus moderne; on a mis au
point les rayons. Ces roues révolutionnaires n'ont que des avantages;
elles sont plus légères, plus régulières et plus résistantes...
Autres révolutions
technologiques, qui vont considérablement augmenter les performances
des bêtes de trait; on équipe les chevaux de colliers qui passent
autour des épaules et non plus autour du cou (on évite ainsi la
strangulation) et l'on réserve aux bœufs un joug de bois qui vient
prendre appui sur leurs fronts et plus uniquement sur leurs cornes.
Tout en permettant un meilleur rendement, ces innovations offrent
également aux animaux un plus grand confort.
Il va sans dire que la caravane s'est équipée en conséquence...
Comment vit-on au sein de la caravane ?
Si les chariots offrent leur abri et leur confort au cours des
déplacements, ils sont un peu délaissés à l'arrêt. Les femmes qui le
désirent et les enfants en bas âge, y trouvent refuge pour passer la
nuit, tandis que els hommes se roulent dans les couvertures et dorment
à la belle étoile.
Lorsque le vent souffle, c'est la solution que l'on retient le
plus souvent; les lourdes tentures de grosses laines et les rebords de
bois offrant une bonne protection aux plus faibles. En période de
pluies, les choses sont plus difficiles et l faut souvent chercher un
abri plus efficace. Quand vient l'été, tout le monde aime à dormir
autour du feu de camp en se serrant les uns contre les autres. En
hiver, par contre, les conditions de vie deviennent trop dures, et l'on
"abandonne" momentanément la protection nocturne des chariots. Il faut
alors chercher abri dans d'éventuelles cavernes, que l'on peut chauffer
par un bon feu, ou proposer ses services dans les fermes ou les hameaux
où l'on obtiendra droit d'asile dans les granges.
Enfin, si le besoin s'en fait sentir, on aura recours aux
solutions extrêmes pour la sécurité des enfants (solutions évoquées
dans les règles de Hurlements).
Les adultes, pour la plupart, savent s'accommoder des rigueurs
de l'hiver. Il est vrai qu'un ours ou un loup savent mieux s'adapter au
froid qu'un petit d'homme...
Comme On l'a vu, les "roulottes" de la caravane sont bien loin
des "maisons sur roues" que l'on imagine. Vous êtes cependant libres
d'aménager vous-mêmes votre refuge; après tout, vous en êtes les
propriétaires occupants...
Bons voyages
Jean-Luc et Valérie Bizien
illustration : Ben
Arcanes strictement réservées aux meneurs de jeu
Cette aide de jeu ne s'adresse qu'aux Veneurs qui ont eu accès
aux révélations du jeu de l'Initié. Elle pourra paraître bien curieuse
aux autres. Il est d'ailleurs fortement déconseillé à ces derniers de
la lire, ou alors... à leurs risques et périls.
Hurlements se veut un jeu de rôle diffèrent, qui offre la
possibilité aux joueurs de s'incarner à travers l'Histoire de France
(et, quelquefois, les y amène par la force des choses); un personnage
peut ainsi, au gré de ses "voyages" côtoyer différents frères, faire la
connaissance de troubadours jusqu'alors restés dans l'ombre...
Traduisez : un joueur, d'une partie à l'autre, et s'il a
effectué seul l'un de ses "voyages", devra momentanément abandonner ses
habituels coéquipiers pour intégrer une nouvelle équipe et vivre
d'autres aventures en leur compagnie ou seul s'il le préfère.
Bien entendu, un tel principe de jeu suppose que le Veneur
dispose de plusieurs groupes de voyageurs à différents stades de leur
évolution/initiation, et que tout soient "compatibles"; si s'asseoir à
une table en compagnie parfaitement antipathiques peut être considéré
comme une belle performance de "joueur de rôle", l'expérience n'en
demeure pas moins difficile à vivre.
C'est pourtant délibérément que nous avons choisi d'inclure
dans nos systèmes et principes l'éventualité du voyage séparant les
habitants de la caravane. Le challenge consistant à rejoindre une autre
équipe plutôt que de se reposer sur une tactique routinière avec de
très vieux compagnons nous paraissait des plus intéressants...
Évidemment, un problème se pose; que faire lorsque le Veneur
fait joueur une équipe "indivisible" (entendez par là; un groupe d'amis
ayant envie de jouer entre eux, par habitude, par choix/obligation ou
tout simplement par plaisir), et que lesdits joueurs n'ont aucun
contact avec d'autres équipes ?
Autre question épineuse; lorsqu'un couple joue à Hurlements,
et que l'un des conjoints, par choix délibéré ou malchance, entreprend
seul le voyage... comment les réunir à nouveau ? Sont-ils condamnés à
errer chacun de leur côté ou leur reste-t-il un espoir ?
Comment un Veneur n'ayant à sa disposition qu'un nombre très réduit de
joueurs peut-il concilier "voyages" et jeu d'équipe ?
Il n'existe pas une solution, mais il y a plusieurs réponses :
* Si les joueurs veulent retrouver leur compagnon pour
vivre à nouveau l'aventure à ses côtés, ils ont toujours la possibilité
de jouer une campagne. Mais attention; une campagne du Jeu de l'Initié,
se vit différemment. Lorsqu'on avance à travers le Temps, même si l'on
demeure insensible à ses effets (les voyageurs ne vieillissent pas), il
n'est jamais possible de modifier son cours ou de revenir en arrière.
Cette solution, si elle est efficace et pratique ponctuellement, peut
très vite entrainer une course poursuite à travers les âges très
néfaste pour tous (les joueurs se privant du plaisir de découvrir une
époque qu'ils ne reverront plus en tant que tels, et le Veneur doit
fournir de gros efforts de documentation (1)...). De plus, en les
attendant, l'infortuné peut rester sage ou s'aventurer à nouveau, au
risque de voyager plus loin encore...
* Une autre solution peut être de voyager ensemble;
assistant au départ de son compagnon/compagne, le personnage pourra
préférer tenter le voyage lui aussi, plutôt que continuer la route
seul. Cette solution sous entend que le personnage a pris conscience de
la nature du "voyage", qu'on lui en a révélé les principes...
Tout n'est ici que question de choix, d'options personnelles...
Appliquée à la lettre, la règle peut poser de lourds problèmes...
De même, "arranger" les choses systématiquement ne peut
constituer une solution pour le Veneur (2). L'idéal réside peut être
dans l'équilibre, afin que chacun trouve dans Hurlements ce qu'il
souhaite.
Car, après tout, tout ceci n'est peut être bien qu'un jeu...
Valérie et Jean-Luc Bizien
(1) D'autres solutions vous seront communiquées très bientôt,
de même que de nombreux suppléments historiques sont prévus, tant dans
les revues spécialisées que dans les Hurlelunes...
(2) Il est bien évident que si une personnage doit effectuer
un voyage il FAUT l'y emmener (que serait le jeu de l'Initié sans cela
?).