Alors qu’ils campent à la belle étoile, les voyageurs sont
témoins d’un inexplicable phénomène céleste : un prodigieux trait de
lumière bleue traverse le ciel de part en part, semblant relier la lune
à un point situé quelque part dans les montagnes lointaines.
Inexplicable mais grandiose, le phénomène devrait les intéresser, en
sorte qu’arrivés au prochain village, ils posent des questions à son
sujet et apprennent qu’il s’agit du reflet de lune dans le miroir de
Zawé — une légende gnome. A ce nom, l’un d’eux devrait se rappeler une
vieille chanson populaire et comprendre entre les lignes que se mirer
dans le miroir en question pourrait fort bien rapporter une tête de
dragon. Telle devrait alors être la quête des voyageurs.
Les tests de ce scénario ont révélé trois grandes directions
possibles. La première (la moins souhaitable) : arrivés au village, les
voyageurs sont tellement accaparés par les activités locales — un peu
prenantes, il est vrai — qu’ils en oublient (ou n’ont pas le loisir)
d’enquêter sur le phénomène lumineux et reprennent leur voyage en étant
complètement passés à côtés du principal. La seconde (à peine meilleur)
: ils s’enfoncent dans les montagnes à la recherche du miroir et
peuvent s’estimer heureux s’ils parviennent seulement à survivre. La
troisième (et c’est la bonne) : puisque légende gnome il y a, ils vont
pousser leurs recherches du côté de la cité gnome voisine, et là, s’ils
font la bonne démarche, découvrent un chemin infiniment plus direct.
Comme prévu dans la chanson, tout se termine alors par une tête de
dragon, rare occasion pour les vrai-rêvants d’en avoir une.
Le pinceau bleu
Tout commence par un beau soir de printemps aux alentour de la
pleine lune. Les voyageurs sont en train de dresser leur camp pour la
nuit, leur feu tout juste allumé pétille gaiement, ils sortent du
gris-rêve…
Comme toujours en pareilles circonstances, les voyageurs n’ont que
peu de souvenirs : depuis déjà plusieurs jours, ils cheminent du sud
vers le nord dans les contreforts des Crins de Neige situés à l’ouest.
La veille ou l’avant-veille (?), ils sont passés par le village de
Nikto, un banal village semi montagnard, et appris qu’à deux jours au
nord se trouvait le village de Sogranith. Ils ont marché toute la
journée sur une petite route caillouteuse et ne devraient plus en être
très loin, mais dans le doute du gris-rêve, ils ont préféré s’arrêter à
l’heure de la lyre. Le vallon où ils se sont installés est calme et
verdoyant, la nuit s’annonce claire et douce, tout va bien.
Abusés par la sérénité ambiante, il se pourrait que les voyageurs
s’endorment sans monter de garde. Au Gardien des Rêves de trouver alors
un prétexte pour les réveiller, la visite nocturne d’un animal par
exemple. L’essentiel est que l’un d’eux au moins puisse être témoin du
ciel vers l’heure de l’Araignée.
La lune presque pleine monte doucement à l’assaut des étoiles
lorsque quelque chose prend naissance dans le ciel, d’abord ténu, puis
de plus en plus affirmé : un prodigieux rai de lumière bleue qui semble
relier l’astre à un point des montagnes, loin à l’ouest, à cent
kilomètres ou plus. (Imaginez un super projecteur bleu de quelques
millions de watts cachés quelque part dans une vallée et braqué en
direction du zénith). Le phénomène est non seulement stupéfiant, mais
d’une beauté certaine. Malheureusement, aucune connaissance, aucune
légende, ne fournira d’explication à ce stade-là de l’aventure.
Le pinceau de lumière prend naissance vers mi-Poisson Acrobate,
atteint son maximum d’intensité à la mi-Araignée, et commence à
décroitre pour disparaitre à la mi-Roseau. Durant tout ce temps, son
inclinaison dans le ciel varie légèrement en sorte qu’il semble
toujours orienté vers la lune. Il est toutefois impossible de définir
s’il s’agit d’une lumière terrestre éclairant la lune ou d’une lumière
lunaire braquée vers la terre.
Comme il n’y a rien d’autre à faire que s’interroger vainement,
les voyageurs devraient finir par se rendormir et reprendre la route le
lendemain matin.
La région
S'étendant du nord au sud sur près de 1500 km, les chaines des
Crins de Neige est réputée infranchissable. Dés légendes affirment que
le monde s’arrête au delà et que pour éviter de tomber dans l’abime des
limbes, les Grands Rêveurs ont placé cette barrière en guise de
garde-fou. (Le plus curieux est que cette légende a cours tant à l’est
qu’à l’ouest de la chaine). Ses sommets culminant à 8 ou 9000 mètres
sont perpétuellement pris dans la glace et personne ne connait sa
largeur véritable.
Sogranith se trouve entre la forêt d’Hank, une sombre forêt de
chênes aux profondeurs inexplorées, et des montagnes, à mi distance
environ de Grand-Pierre et d’Estombe (cf. la carte centrale du Miroir
N° 3). La bande située entre la forêt d’Hank et les Crins de Neige, où
serpente la route actuellement suivie par nos voyageurs, est une région
de petite montagne, de contreforts boisés, de cascades et de torrents
bondissants, ça et là ponctuée d’un village de pierre et d’ardoises,
entouré de pâturages où paissent vaches et moutons. Nikto en est
l’exempe type, un village tranquille, replié sur lui-même, aux paysans
francs comme la pierre et à peu près aussi Causants. La faune sauvage
est nombreuse, tant gibier que prédateurs : lapin, chevreuils, tétras,
aigles, chats sauvages, vipères et ours en sont les principaux.
Sogranith
D’environ 200m de diamètre, situé en retrait de la route et la
dominant d’une légère hauteur, Sogranith est un village compact. Les
maisons de son pourtour sont toutes collées les unes aux autres et
aucun mur extérieur, n’a de porte ni de fenêtre, rempart trapu
chapeauté d’ardoises grises. On n’y entre que par deux espaces enserrés
d’une voûte de pierre, véritables portes de cité ménagées entre les
maisons : la porte des Hommes au sud (Loc. 1 sur le plan), et la porte
des Gnomes au nord (Loc. 2). Si l’extérieur est sévère, l’intérieur est
plus relâché : maisons d’habitation avoisinant granges et étables sans
grand souci d’urbanisme, dans un dédale de cours et de jardins. Seul le
centre retrouve toute la rigueur du dehors : une étonnante place carrée
d’une bonne quarantaine de mètres de côté, soigneusement pavée et
entourée d’arcades, où donnent des maisons nettement plus bourgeoises.
C’est la place d’Armes (Loc. 3).
Sur cette place donne une assez grande auberge, avec ses
dépendances : l’Auberge du Gantelet (Loc. 4). Les autres belles maisons
(Loc. 5 - 9) appartiennent toutes aux dirigeants du village : les
membres du Conseil de Fer.
Hommes et sous-hommes
A Sogranith, l’épée fait l’homme — l’inverse n’étant pas vrai
comme on le verra plus loin. C’est ainsi que pour être un homme, il
faut posséder une épée. Ceux qui n’en possèdent pas sont les
sous-hommes. Un homme qui perd son épée devient un sous-homme. Un
sous-homme qui acquiert une épée et prouve qu’il est digne de la
conserver, devient un homme. La possession de l’arme n’est pas tout,
en, effet, il faut savoir s’en servir. Pour se le prouver, les hommes
de Sogranith se livrent à des duels continuels, d’où le nom et
l’utilité de la place d’Armes.
Les hommes de Sogranith se distinguent mutuellement par une
complexe hiérarchie de points de valeur appelée cote de fer. Remporter
un duel difficile fait gagner des points de fer, perdre un duel facile
en fait perdre. Dans tous les cas, le perdant doit donner son épée à
son vaiqueur. Lors, de deux choses l’une : soit le perdant n’a
réellement plus d’épée et est ravalé au rang de sous-homme, soit il
peut s’en procurer une autre et il conserve la dignité d’homme. Il a
pour ce faire jusqu’au coucher du soleil. Le fait de gagner des duels,
et donc des épées, écarte évidemment ce souci pour un temps. A défaut,
on peut racheter une épée chez Zarlom Bioutifour, le marchand d‘armes.
Ce n’est pas donné. De fait, Sogranith est réputée dans la région pour
l’excellence de ses épées : des armes garanties de pure fabrication
gnome. A 60 km au nord, se trouve la cité gnome de Gomi-Nobad. Quoique
très mystérieuse, cette cité est toujours en activité et ne traite
qu’avec Sogranith, Zarlom Bioutifour — et ses prédécesseurs — ayant
obtenu l’exclusivité du marché. Périodiquement, des caravanes de
Grand-Pierre ou d’Estombe viennent à Sogranith acheter des armes, d’où
la présence de la grande auberge ainsi que le côté fleurissant du
village et du marchand d’armes en particulier. Au détail, Zarlom
Bioutifour vend l’épée courte 95 pièces de bronze et l’épée longue ou
large, 160. (Les gnomes ne font pas de bâtarde). En gros (à partir
d’une vingtaine), le prix peut baisser de 15 à 20%. D’escellente
facture, ces armes respectivement 14, 15 et 18 points de résistance.
Telle est la vie à Sogranith, perpétuellement à l’heure des Epées.
Le village est dirigé par le Conseil de Fer, qui comprend les six
hommes possédant la meilleure cote de fer. Ce sont :
- Arduk Zolotoff, le maitre d’armes (loc. 9), 98 pts
- Zarlom Bioutifour, le marchand d’armes (loc. 5), 94 pts
- Gribor Mahiote, le vétérinaire (loc. 6), 72 pts
- Kural Zohiab, le charron (loc. 7), 70 pts
- Eras Pomidor, l’aubergiste (loc. 4), 62 pts
- Glitong Arrikal, le forgeron (loc. 8); 60 pts
L’erreur, que commettent souvent les étrangers, serait de croire
que ces gens ne sont que des rustres affublés d’une épée décorative,
erreur funeste en vérité ! Arduk Zolotoff, le chef du conseil, manie
l’épée longue au niveau +12. C’est par ailleurs un excellent
professeur, et ceux qui peuvent se payer ses leçons, deviennent vite de
redoutables bretteurs. L’homme moyen, 15 points de fer, a +5 à l’épée.
Les duels entre villageois sont usuellement au premier sang, sauf
spécification contraire. Un duel à mort rapporte évidemment un maximum
de points.
Les sous-hommes n’ont aucun droit civique. Ils ne doivent adresser
la parole aux hommes ou aux membres de leur famille qu’après moult
génuflexions et signes d’humilité. S’ils commettent un délit, par
exemple lever ouvertement les yeux sur la femme d’un homme, ils sont
mis à la masse, supplice qui consiste à se faire écraser telle ou telle
partie du corps su l’enclume du forgeron. Nombre de sous-hommes
appartiennent à des hommes : plus que des serviteurs, ce sont de
véritables esclaves.
Hiérarchiquement les 600 habitants de Sogranith se répartissent
ainsi : hommes (50), femmes (250), sous-hommes (200), enfants de moins
de 14 ans (100). Il n’y a pas de sous-femmes : toutes les femmes sont
supérieures aux sous-hommes. Mais les épouses des hommes sont
tacitement supérieurs aux épouses des sous-hommes et toutes les jeunes
filles rêvent d’épouser un homme de préférence.
Quand un garçon atteint l’âge adulte, 14 ans, soit ses parents
peuvent lui offrir une épée et il devient un homme, soit ils sont trop
pauvres et il devient un sous-homme. A Sogranith, on est généralement
homme ou sous-homme de père en fils, barrière sociale rarement
renversée, à l’approbation totale du Conseil de fer, des Zolotoff et de
Bioutifour en particulier. (Il parait d’ailleurs que ce serait ces deux
familles qui auraient institué tout le système, quatre ou cinq
générations auparavant).
Le contact
Les rapports entre les voyageurs et les villageois de Sogranith
vont évidemment dépendre des épées : les voyageurs porteurs d’épées
seront considérés hommes, et tous les autres sous-hommes. Si une
voyageuse porte une épée, on considèrera cela comme une bizarrerie
négligeable. Notez la fixation sur les épées. Un personnage armé d’une
hache de bataille, aussi redoutable soit-il, ne sera toujours qu’un
sous-homme.
Ce qui rapporte le plus de points de fer, ce sont les duels avec
les étrangers, car ce sont souvent des duels à mort. L’arrivée de
voyageurs est donc toujours un événement, et l’on souhaite ardemment
qu’il y ait des hommes parmi eux. On les évalue, on les jauge, et le
plus ambitieux de Sogranith se décident à y aller. Leur attitude n’est
plus alors qu’arrogance et provocation. Ils n’agressent jamais
directement les voyageurs, mais font en sorte de les faires sortir de
leurs gonds, afin que ce soient eux, les voyageurs, qui soient les
agresseurs. Tout cela ayant bien entendu lieu devant témoins. Une fois
publiquement offensé, l’homme, ayant le choix des armes, l’épée,
provoque l’étranger en duel. La rencontre a lieu au début de l’heure
suivante, sur la place d’Armes, en présence du Conseil de Fer et de la
majeure partie de la population, hommes, femmes et sous-hommes
rassemblés.
Les règles sont simples : le premier qui mord la poussière à
perdu. Si c’est le voyageur, il doit donner son épée à son vainqueur,
puis quitter les lieux séance tenante. S’il est trop grièvement blessé
et n’a pas de compagnons pour l’aider, on le porte chez Gribor Mahiote,
le vétérinaire, qui le soigne. A son rétablissement, soit il paye les
honoraires et quitte le village, soit il appartient à son vainqueur qui
règle les frais pour lui.
Si le voyageur gagne, il devient Citoyen d’Honneur de Sogranith et
son nom est inscrit dans les Mémoires de fer. Hormis cela, le titre est
totalement honorifique et ne confère aucun avantage. Entre autres, il
ne protège pas de la rancune et du désir de vengeance que lui
témoignent immanquablement les proches du perdant.
La provocation la plus courante consiste à accabler les
sous-hommes voyageurs (les ans épées), notamment si l’un d’eux à
l’audace de prendre la parole sans permission, et de rejeter la faute
sur le supposé propriétaire du sous-homme (un voyageur avec épée). Soit
ce dernier paye l’amende, soit son sous-homme est arrêté et
immédiatement mis à la masse. Cela marche à tous les coups.
La légende
En termes de jeu, cette histoire d’épées a un double but :
rendre le séjour à Sogranith difficile, en sorte que découvrir la
légende de Zawé ne soit pas chose aisée, et amener les voyageurs à
s’intéresser aux gnomes. N’importe quel villageois (homme, femme,
sous-homme) interrogé sur le trait lumineux répondra : « Y a point
de mystère là dedans ! C’est juste la lune qui se regarde dans le
miroir de Zawé... » Le phénomène est en effet visible de
Sogranith, et l’on y est tellement habitué qu’il ne suscite pas plus de
curiosité que les lunaisons elles-mêmes. Si un voyageur insiste alors,
demandant qui est Zawé, qu’est ce que ce miroir, et d’où tient on cette
histoire, on lui répondra : « Y’a points de mystère là dedans !
C’est juste une légende gnome... »
Cependant, si le phénomène lumineux lui-même n’a rien pu dire aux
voyageurs, le nom de Zawé, lui, devrait susciter le souvenir d’une
vieille chanson. Faire jouer Intellect/Légendes à –5. En cas de
réussite, on se souvient exactement des paroles de la chanson de
Zawémornfuldintong, un supposé Dragon du Premier Âge. Les paroles de
cette vieille ballade enfantine ont toujours été supposées n’avoir ni
queue ni tête. Mais à propos de tête, justement, et en supposant que ce
miroir existe réellement, ne serait-il pas finalement intéressant
d’aller voir ce la de plus près ? Note. Normalement, les gens de
Sogranith n’en savent pas plus et ne connaissent même pas la chanson.
Toutefois, si aucun voyageur ne réussit son jet de Légendes, on
supposera la chanson connue à Sogranith, et un gamin passant par là la
chantera justement. Il est indispensable que les voyageurs la découvre
d’une façon ou d’une autre; mais dans les cas, à eux d’en tirer
eux-mêmes leurs conclusions. Pour les villageois, c’est réellement une
comptine sans queue ni tête. Enfin, notez qu’aucun villageois n’amènera
lui-même la conversation sur la lumière. Si les voyageurs n’en parlent
pas les premiers, ils passeront à côté de tout.
La quête
Une fois remémoré ou entendu la chanson, les voyageurs
devraient normalement s’intéresser au « miroir ». Et si du
symbole allégorico-mythique on passait à une réalité tangible ? Or pour
autant qu’ils aient pu en juger, l’extrémité terrestre du pinceau bleu
semble située à une bonne centaine de kilomètres à vol d’oiseau. Est-il
seulement possible d’y parvenir à pied ?
Les voyageurs peuvent tenter cette gageure. Leur survie dépendra
alors autant de leurs compétences (Srv en montagne, en glaces,
Escalade) que de leur matériel : cordes, pitons, couvertures, tentes,
etc. Les Crins de Neige culminent à 9000 m et la plupart des cols sont
à 4 ou 5000 m. escalades périlleuses, neige, glace, froid, brouillard
givré, avalanches, crevasses, Glous et Tournedents seront du programme.
Au Gardien des Rêves d’improviser la randonnée et de juger si le
glacier miroir peut finalement être atteint de cette façon.
Mais pourquoi ne pas commencer par aller trouver les Gnomes de
Gomi-Nobad ? Pour cela, il faut d’abord être au courant de leur
existence. Or interrogés à leur sujet, puisque de leur propre aveu il
s’agit d’une légende gnome, les villageois hausseront les épaules,
évasifs et non concernés. « Autrefois… peut-être… il y avait des
gnomes à Gomi-Nobad… Mais, ajoutera-t-on, c’est inutile d’y aller :
Zarlom Bioutifour a l’exclusivité. Vous vous casseriez le nez ! »
De fait, les voyageurs auront pu noter que Gliftong Arrikal, le
forgeron, arrive tout juste à forger des fourches et des socs de
charrue. Par ailleurs, les épées proposées par Zarlom Bioutifour sont
réellement parfaites; et Vue/Métallurgie à 0 peut effectivement
accréditer leur origine gnome. N’y a-t-il pas là de quoi attiser un peu
la curiosité ?
Finalement, en insistant un peu, les voyageurs devraient obtenir
le renseignement désiré : Gomi-Nobad se trouve au nord. On y accède en
empruntant un lacet secondaire, vers l’ouest, à deux jours de marche.
Extérieurement, la cité gnome n’est rien d’autre qu’un tunnel
s’enfonçant dans le flanc à pic de la montagne.
Gomi-Nobad
La réalité est déconcertante. Il y a bien des Gnomes à
Gomi-Nobad mais aucun Humain n’en a réellement vus depuis des
générations. Leur timidité et leur sauvagerie sont telles qu’ils
refusent systématiquement le contact. Les seuls Humains que certains
d’entre eux acceptent de voir sont une poignée de gardes qui vivent à
demeure dans les salle d’entrée. Selon les clauses d’un accord qui se
perd dans le flou du début Troisième Âge, ces gardes humains sont des
intermédiaires et leur défenseurs, leurs « agents » chargés
de former un barrage infranchissable. En échange, ils peuvent garder le
pourcentage de leur choix sur toutes les transactions d’armes. Tout ce
que demandent les gnomes, c’est avoir la paix. Les gardes sont une
douzaine, vêtus de cuir + métal, armés d’épées larges et de boucliers.
Six d’entre eux tirent à l’arbalète. A leur tête se trouve l’intendant,
un homme maigre et blême, aux yeux jaunes, enfoui dans les replis d’une
grande soutane noire.
Chansons du miroir de Zawémornfuldingtong
Refrain
Zawémornfuldingtong
Que ta beauté est belle !
Pin pon ! Crac boum ! Ding dong
Couplets
Admirable Zawé
Tu te mires à loisir
Dans ton miroir glacé
Qui ne peut pas mentir !
Que sonne la trompette
Ou que chante l’oiseau
Tu contemples ta tête
Des sourcils aux naseaux !
Et ton âme s’élève
Et ton âme se pâme
Car le miroir pim pam !
Te montre aussi ton rêve !
Eh oui, puissant Zawé !
Tu peux soupirer d’aise
Ton grand miroir glacé
Est un miroir balaise !
Et ceux qui après toi
S’y mireront aussi
Comprendront bien pourquoi
Il doit en être ainsi !
Ils y prendront ta tête
Zawémornfuldingtong !
Des sourcils au menton :
Ta Tête de dragon ! |
Mais le plus étonnant est que, vis-à-vis des visiteurs, ces gardes,
humains, prétendent être des Gnomes. Telle sera la découverte et la
déconvenue des voyageurs. Impossible de voir un vrai gnome. (on suppose
naturellement, quelque soit leur niveau de Légendes, qu’ils savent ce
qu’est un gnome). « Comment ça, c’est tout petit, un gnome ?
Rugira l’un des gardes. Attention à ce que vous dites ! Nous, les
gnomes, on n’aime pas qu’on nous traite de haut ! »
Eventuellement, tout ce que les gardes admettront, c’est qu’il y a
effectivement des gnomes plus petits : ils travaillent loin en bas dans
les galeries et ne veulent pas être dérangés.
Extérieurement, l’entrée de Goma-Nobad est une voûte de 3 m de
large, creusée à même le flanc de la montagne, se poursuivant par un
tunnel de même largeur. Deux des gardes y stationnent en permanence,
l’un d’eux armé d’une arbalète. C’est avec eux qu’auront lieu le plus
gros des discussions (loc. 1).
Le placard de Zawé
L’une des caractéristiques (gnomes ?) des gardes est leur
extrême susceptibilité. Vite persuadés que les voyageurs ne sont pas
venus acheter des armes en gros — « de toute façon, nous, les
gnomes de Gomi-Nobad, nous ne traitons qu’avec le marchand de Sogranith
! » - vite méfiants, donc, ils auront tôt fait de s’écrier :
« Allez ! Circulez ! Ou on vous colle au placard de Zawé
!... » Indépendamment de la menace, le nom de Zawé devrait faire
tiquer les voyageurs. Diplomatie aidant et bribe par bribe, à eux
d’obtenir alors les renseignements suivants.
Le placard de Zawé est le nom donné à une cellule. C’est là qu’on
enferme les fautifs, et les intrus de tous poils. Mais le plus drôle,
figurez vous, est que quand on rouvre la porte une heure plus tard, il
n’y a plus personne ! Et pourtant le placard n’a aucune autre issue, et
la porte est solide ! Maintenant, pourquoi l’appelle-t-on placard de
Zawé ? Aucun des gardes ne le sait, ni ne s’en soucie. Peut-être les
petits gnomes le savent-ils, mais pas questions de les déranger. Si les
voyageurs insistent à ce sujet, les gardes montreront à nouveau les
dents, réitérant la menace : « J’ai beau être un gnome patient,
j’en connais des qui vont finir au placard de Zawé ! »
En ce qui concerne le pinceau bleu, les gardes en ont entendu
parler, mais ne l’ont jamais vu : « C ‘est une légende de
Sogranith », diront-ils.
Le mieux que pourront obtenir les voyageurs sera une entrevue avec
l’intendant. On les fera entrer dans la salle de réception (loc. 2), où
un banc de pierre entoure un grand pilier. On les priera de s’asseoir
en attendant sa venue. Il n’y a pas d’issue visible à cette salle.
L’entrée du couloir du fond est masquée par une zone d’illusion
géographique (permanente) imitant la continuité de la paroi (loc. 3).
C’est par là que surgira l’intendant aux yeux jaunes. Si un voyageur
s’étonne de son apparition, il dira d’un ton dramatique : « Nous
les gnomes, pouvons traverser la pierre ! » Le personnage est
encore plus gnome que les gardes et l’on en obtiendra rien de plus. Il
est interdit aux étrangers de s’aventurer au-delà de la salle de
réception, sous peine d’être conduits au placard de Zawé.
Désespérément, il n’y a rien d’autre à tirer de ses soi-disant
gnomes. Et pourtant, pourquoi le placard de Zawé ? Quel rapport avec le
miroir du même nom ? Et où disparaissent ceux qui sont enfermés dans
ledit placard ? Une déchirure du rêve, une téléportation ? Et menant où
? Au miroir de Zawé ?... Comment en être sur ? La réponse est
douloureuse, car totalement dépourvue de garantie : il faut l’essayer.
Tel est donc le coup de dés auquel seront réduits les voyageurs.
Notez que personne ne les y oblige. Ils peuvent reprendre leur route et
oublier cette histoire de lumière bleue. Ou bien ils peuvent tenter le
sort, voir où ça mène. Ne sont ils pas des voyageurs ?
Se faire arrêter ne posera aucun problème. « Allez ouste !
Cette fois-ci, vous êtes bons : au placard de Zawé ! » Et sans
même les entraver ni leur retirer leurs armes et bagages, on les
conduits au-delà de la zone d’illusion, dans un couloir perpendiculaire
où donnent 3 portes : à droite, les quartiers des gardes (loc. 4); à
gauche, ceux de l’intendant (loc. 5); la troisième porte (loc. 6) est
minuscule et donne sur un labyrinthe de galeries de 1,20 m de haut : la
véritable cité gnome (loc. 8). De toute façon, ce n’est par aucune de
ces portes qu’on entrainera les prisonniers, mais à nouveau à travers
une zone d’illusion géographique (loc. 7). Et après un étroit abrupt,
on se retrouvera dans un cul de sac, devant une porte solidement ferrée
et barrée : le placard…
La cellule est toute en longueur, prolongement du couloir, et se
termine par une alcôve ronde de 3 m de diamètre. Nulle réverbération
jaune, ni mauve, ce n’est pas une déchirure du rêve. Détection
d’Enchantement peut cependant révéler une aura positive et Lecture
d’Aura magique indiquer : Collines de Stolis A11 : Permanence de zone
et zone de Téléportation.
Le sanctuaire de glace
Le miroir de Zawé existe-t-il vraiment en tant que tel ? Il est
impossible de répondre, de la même façon qu’il est impossible de
répondre à la question : les Dragons existent-t-ils vraiment ? Qui dit
fantastique, dit mystère : sachons le conserver. La fin de ce scénario
devra donc se passer d’explications et de pourquoi, aussi bien pour le
Gardien des Rêves que pour les joueurs. Contentons nous des faits.
La téléportation d’arrivée donne dans une alcôve semblable, au fond
d’une vaste salle vde fermée par une double porte de fer. Il y règne
l’obscurité la plus complète et un froid intense, -5°. Appliquer les
règles de froid, page 49 des règles. La porte n’est pas verrouillée
mais excessivement lourde et gauchie. Elle donne sur un couloir
artificiellement creusé, se poursuivant à chaque bout par un escalier,
l’un descendant (loc. 2), l’autre montant. Le froid semble encore
augmenter vers le haut, indiquant ostensiblement la sortie. Si les
voyageurs préféraient toutefois descendre, ils tomberaient sur un
réseau de galeries peuplées de Chafouins des Glaces. Mêmes
caractéristiques que les Chafouins ordinaires, mais velus au lieu
d’être glabres. Au Gardien des Rêves d’improviser cette mauvaise piste.
L’escalier montant donne dans une caverne de glace (loc. 3) :
sols, parois, piliers, tout est glacé, température –10°. Les petites
galeries latérales sont moins froides, mais mènent également à des
Chafouins. La caverne se termine par un large escalier en spirale aux
marches intégralement faites de glace (loc. 4). Y conserver son
équilibre est difficile. Le froid augmente de plus en plus. Et l’on
finit par déboucher à l’extérieur, dans le flanc d’une falaise de
glace, par un orifice hérissé de stalactites translucides. Température
–20°.
La falaise borde une cuvette de 7 km de diamètre, un cirque
entièrement rond, sans col ni accès visible. Tout est gelé, et le fond
du cirque, glacier parfaitement lisse et plat, luit comme un formidable
miroir.
Notez que la téléportation est instantanée et que le temps est le
même. La description devra être différente selon que les voyageurs
débouchent de jour ou de nuit.
Le jour, un soleil aveuglant se reflètent dans le lac gelé et
brûle les yeux dans une conflagration de couleurs. La nuit, à mesure
que la lune se lève au-dessus des bords du cirque, la glace prend une
teinte bleu profond. Et plus la lune monte, et plus c’est tout le
cirque qui baigne dans une hallucinante lumière bleu lune. Vers la
mi-Poisson Acrobate, le centre du cirque glacé semble exploser de
lumière bleue tandis qu’une formidable colonne lumineuse s’érige en
direction du firmament.
Si les voyageurs se trouvent au centre du lac-miroir quand se
produit ce phénomène, ils seront expulsés vers un autre rêve comme à
travers une déchirure. Ils se réveilleront ailleurs, ne conservant de
cette histoire que l’impression d’avoir rêvé — mais avec en même temps
l’impression grisante de n’être plus tout à fait le même. En termes de
jeu, chacun pourra tirer une tête de dragon, avant de repartir vers de
nouvelles aventures.
Scénario et Plans : Denis Gerfaud
Illustration : Rolland Barthélémy
Les hommes de Sogranith
Taille 11 Volonté 12 Vie 12
Constitution 13 Intellect 9 Endurance 24
Force 12 Empathie 10 Vitesse 12
Agilité 13 Rêve 11 +dom 0
Dextérité 11 Mêlée 12 Protection d2 ou 0
Vue 10 Tir 10
Ouïe 10 Lancer 11
Odorat 9 Dérobée 11
Epée longue niv +5 init 11 +dom +3
Esquive niv +5
Les hommes portent usuellement du cuir souple, mais les duels ont lieu
en chemise.
Pour des individus différents, conserver les caractéristiques et
modifier les compétences en plus ou en moins. |
Les gardes de Gomi-Nobad
Taille 13 Volonté 12 Vie 13
Constitution 13 Intellect 7 Endurance 25
Force 14 Empathie 10 Vitesse 14
Agilité 13 Rêve 11 +dom +1
Dextérité 11 Mêlée 13 Protection d4 +2
Vue 11 Tir 11
Ouïe 10 Lancer 12
Odorat 8 Dérobée 10
Epée large niv +4 init 10 +dom +4
Dague niv +4 init 10 +dom +2
Corps à corps niv +4 init 10 +dom (+1)
Arbalète niv +4
Bouclier niv +4 (bouclier moyen)
Esquive niv +5 |