Article paru dans Dragons Radieux N° 07


Le sujet dans ses Grandes Lignes

Comme dans Le Cidre de Narhuit ou L’Acrobate, ce scénario propose une quête de souvenir. Après avoir aperçu une vieille tour au sommet d’une île sur un lac, et s’être renseignée sur elle, les personnages font tous le même rêve ; apparemment envoyés par un personnage important, ils rendent visite à l’alchimiste qui réside dans cette tour pour s’informer du résultat de ses travaux. Au réveil, ils sont tous en proie à la même sensation de frustration et d’excitation ; la certitude que ce rêve était le souvenir d’une vie antérieur. Or ils sont surtout marqués par trois détails. Parmi les appareillages de l’alchimiste, un liquide rouge vif argenté de paillettes passait d’une cornue à une autre à travers un serpentin; le feu ronflant dans l’âtre projetait tout cela en ombres chinoises; et au moment même où l’alchimiste allait parler, une horrible grincette se fit entendre dans 1a pièce. Pour retrouver ce rêve, pour se souvenir de leur archétype, et en termes de jeu gagner des points d’expérience, les personnages doivent réunir à nouveau toutes ces conditions : se trouver dans le laboratoire de l’alchimiste, voir le liquide rouge passer dans les tubes, les ombres chinoises projetées par feu, et entendre simultanément une grincette…
Tout cela n’ira pas sans problèmes. La tour sert actuellement de repaire à une bande de brigand qu’il faudra d’abord déloger. Parmi les débris d’une cave, les personnages trouveront des grincettes, mais restera à en capturer une. Pour le liquide alchimique, ils trouveront tous les ingrédients nécessaires dans le laboratoire, excepté une plume de zyglute qu’ils devront aller chercher dans les marais. Le feu ne voudra pas prendre dans l’âtre, la fumée sera refoulée. Le conduit de la cheminée est obstrué par un Noir de Suie, une entité de cauchemar pleinement incarnée. Et enfin, si l’alchimiste du groupe commet une erreur de manipulation en recréant le fluide rouge, il risque de se produire une très violente explosion. Ce scénario est prévu pour des personnages déjà confirmés : niveau +4 ou +5 dans les meilleures compétences. Leur nombre ne doit pas excéder 5. Il est indispensable que l’un d’eux maitrise la compétence Alchimie, niveau zéro au minimum.

INTRODUCTION

Tout commence par un bref aperçu de la tour de Són. Au mois de la Couronne, début de l’été, en voyage vers le sud-ouest dans la Vallée des Lacs, les personnages arrivent en vue du lac de Kaldrémur vers la fin de l’heure des Épées. La route fait un coude et longe ensuite le lac vers le sud. A quelques 700 mètres du rivage, au sommet d’une île escarpée, les ruines d’une vieille tour se découpent dans le soleil couchant. Le paysage est intéressant et les voyageurs peuvent s’y attarder quelques instants ; mais à part cela, rien de particulier.
Trois kilomètres plus loin, le petit village de Némur se tasse entre les collines et les rives du lac. C’est un village agricole (la vigne pousse bien sur les coteaux à l’est) et de pêcheurs. Plusieurs barques sont amarrées à un appontement. La Maison des Voyageurs y est accueillante. Les voyageurs pourront obtenir les renseignements suivants sur la région
La route se poursuit vers le sud jusqu’au village de Kaldron, où elle rejoint la grande route de Tolmod. A Kaldron, il y a un pont pour traverser le Bwo. C’est un village de commerçants et d’artisans. Avant Kaldron, la petite route contourne les Marais Gris, un lieu invivable de moustiques et de serpents. De l’autre côté du lac de Kaldrémur, s’étend la forêt des Cargnes. Les cargnes sont le nom que l’on donne dans la région à de grands sangliers roux. Quant à l’île, c’est l’île de Són, avec la tour du même nom. Personne n’y va. C’est complètement sauvage. Les pécheurs évitent même de s’en approcher car il y rôde des choses de cauchemar. Són était le nom d’un haut-rêvant du Second Âge. Honte à lui et à toute sa descendance !...

Un rêve marquant
Les personnages n’obtiendront pas d’autres renseignements sur la tour de Són. Les villageois n’en savent apparemment pas plus, la superstition et la peur de la magie les rendra muets si l’on insiste. Toutefois, INTELLECT /Légendes à –5 permet de se rappeler la légende du prince Obniuk . Ce seigneur du Second Âge, très désavantagé de sa personne, entretenait un alchimiste dans l’espoir d’obtenir un élixir de beauté. L’alchimiste en question s’appelait Són. Puis, qu’ils se souviennent ou non de la légende, les voyageurs feront tous le même rêve. Le nom de Són suffira à le déclencher, comme un carillon qui les poursuivra dans leur sommeil jusqu’au profond de leur rêve.
Durant la première séquence, ils se dirigent vers l’île dans une longue barque manœuvrée par une dizaine de rameurs. Eux-mêmes sont assis à la poupe, ils sont richement vêtus et bien armés. Ils savent qu’ils ne font pas un voyage d’agrément, mais qu’ils sont en mission. Au sommet de l’île, se dresse une haute tour de trois étages. Seconde séquence, les personnages sont dans l’île. Ils gravissent à pied un petit sentier entre des hêtres et des châtaigniers. Troisième séquence, ils sont au pied de la tour. On y entre par une large porte située à sa base. Des serviteurs les invitent à entrer. On leur fait descendre un escalier en colimaçon. Quatrième et dernière séquence, les personnages sont dans le laboratoire de maître Són. Une pièce de dimensions moyennes, sans fenêtre. Une bonne brassée de bois pétille dans un âtre et fait danser des ombres sur les murs. Sur une longue table encombrée d’un échafaudage complexe de tubes, d’alambics et de cornues, un liquide rouge vif pailleté d’argent bouillonne dans un serpentin. L’alchimiste est avec eux. Il est sur le point de répondre à leur question. Les reflets du serpentin teintent ses longues mains de rouge. Le feu qui danse dans l’âtre projette sur le mur l’ombre chinoise des cornues. Le temps semble s’arrêter sur cette vision. L’alchimiste va parler et c’est alors que, issu d’un angle de la salle, du côté du tas de bois près de l’âtre, monte le cri d’une grincette, déchirant le rêve en cent lambeaux rouges et jaunes ...
Ce rêve laissera aux personnages une impression pénétrante de frustration et d’obsession. Qu’allait dire maître Són ? Et que faisaient-ils là eux-mêmes ? Qui étaient-ils ? Les personnages auront en effet la certitude que ce rêve était le souvenir d’une vie antérieure. Et une autre certitude s’imposera à eux : s’ils pouvaient se retrouver à nouveau dans le laboratoire de maître Són, voir à nouveau le fluide rouge pailleté traverser le serpentin, voir à nouveau le feu dans l’âtre faire danser l’ombre des cornues sur les murs, et s’ils pouvaient au même moment entendre une grincette, nul doute qu’ils pourraient continuer leur rêve au point d’interruption et se rappeler une foule de souvenirs de cette vie antérieure. En termes de jeu la réunion de ces 3 éléments catalyseurs, fluide rouge, feu dans l’âtre et grincette, permettra que leur prochain rêve soit un souvenir d’archétype. Chacun recevra alors 60 points d’expérience (De véritables ponts d’expériences, pas des points de stress). Mais pour être automatique, le rêve critique devra avoir lieu au plus tard dans 4 nuits. Passé ce délai, il cesse d’être automatique et les chances qu’il ait lieu baissent de 5% par nuit : 95%, 90% ; 85% etc. En cas d’échec à ce jet de pourcentage, le rêveur ne gagne que 12 points d’expérience. Ces points pourront être répartis librement, à condition de respecter les limites de l’archétype et de ne pas augmenter une compétence de plus d’un niveau à la fois.

L’ILE DE SON

Personne à Némur ne voudra piloter les voyageurs sur l’île. Ils devront acheter une barque ou la louer en payant une caution, ce qui revient au même. C’est l’outil de travail des pêcheurs et ils ne s’en déssaisissent pas volontiers. Pour une barque pouvant emporter 5 personnes, on leur demandera 60 PB (et le pêcheur sera prêt à la reprendre pour 40). Reste également la possibilité d’utiliser le sort Barque de rêve. L’île de Són fait un peu plus d’un kilomètre de long sur une moyenne de 500 mètres de large. Elle est située à 700 mètres du rivage le plus proche (est comme ouest) mais sa pointe sud est à 2 bons kilomètres de Némur. Alimenté par le Bwo, le lac a un assez fort courant nord-sud. Le Bwo lui-même est une rivière de 20 mètres de large coulant entre des berges encaissées.




L’île est très escarpée. Hormis les 3 plages de galets, sa côte est constituée de falaises rocheuses d’une hauteur de 5 à 10 mètres dans la partie sud et montant jusqu’à 40 mètres dans la partie nord. Chaque ligne de contour représente sur le plan une élévation de 10 mètres. Toutefois à l’intérieur de l’île, ce ne sont pas des falaises brutales, le terrain s’élève régulière- ment. La partie centrale est constituée de bois de hêtres et de châtaigniers. Lapins et pigeons ramiers y vivent en toute insouciance. Ailleurs s’étend un paysage de lande, herbes, genêts, arbustes et arbres isolés.
Contrairement aux rumeurs, l’île n’est hantée par aucune entité de cauchemar. Vers la fin de sa vie, maître Són dut quitter sa tour pour entreprendre un voyage, et pour des raisons inconnues, ne revint jamais. La tour connut bien des avatars au cours des siècles mais son laboratoire secret demeura toujours inviolé. Aujourd’hui et depuis quelques mois, elle sert de repaire à une bande de brigands.

LA TOUR

Le sentier de la plage est n’a pas été emprunté depuis longtemps. Comme il fut jadis empierré, il subsiste encore sous forme de trouée parmi les arbres et les herbes. Le sentier ouest montre par contre des signes de passage évidents, de même que le dernier tronçon au-dessus de la source du ruisseau. VUE /Srv en extérieur à 0 permet d’évaluer qu’un passage a eu lieu tout récemment. La tour est bâtie au sommet d’un mamelon couvert d’herbes et d’arbustes. Seul le rez-de-chaussée subsiste. Les trois étages ne sont plus que des lambeaux de murs enrobés de lierre. La tour devait faire 15 m de haut. L’épaisseur des murs se devine aux pans à demi éboulés, de 1,20 m à 1,50 m. Le sentier mène à une grande porte de bois. Dès les 30 derniers mètres, VUE / Charpenterie à -2 peut faire constater que la porte n’est pas d’époque. Elle a été rafistolée et consolidée.

1. Rez-de-chaussée. Il est constitué d’une pièce unique, carrée, de 5 m de côté. Le sol originellement dallé est couvert de gravats et de moellons éboulés entre lesquels poussent les herbes. La salle est à ciel ouvert. Du plafond à 4 m de haut, il ne reste plus qu’un vague treillis de poutres et quelques lattes de plancher vermoulues. Vus de l’intérieur, les hauts pans de mur semblent prêts à basculer pour s’écrouler une fois pour toutes. Dans l’angle N-O, un escalier de pierre monte encore à ce qui fut le premier étage. Dans l’angle N-E, dans un renfoncement ogival, une ancienne porte se trouve encore intacte. Les brigands y ont déblayé les caillasses pour pouvoir l’ouvrir. Elle donne sur un escalier en colimaçon qui descend. L’angle S-O comporte un âtre. Les brigands l’ont également déblayé et y ont entre- posé des morceaux de bois provenant du pla- fond, mais ils ont renoncé à y faire du feu faute de tirage. La porte d’entrée n’a aucun moyen de verrouillage. Les brigands la bloquent de l’intérieur en y poussant un gros pavé.

2. L’étage. Sur le plan, les parties en pointillé représentent les 4 premiers mètres de mur, ceux qui forment le rez-de-chaussée ; les parties en trait plein représentent les pans de mur qui s’élèvent encore jusque en haut. On peut accéder par l’escalier à ce semblant d’étage. Les larges trouées entre les pans éboulés forment des créneaux naturels. Les poutres et planchers vermoulus sont plus solides qu’ils ne paraissent, mais ne peuvent néanmoins supporter un poids supérieur à 100 kg. Pour se promener sur les poutres isolées (20 cm de large), il faut réussir AGILITÉ /Acrobatie à 0. L’air stupide car donnant dans le vide, on peut encore apercevoir l’âtre de cet étage.

3. La cave. On y accède par l’escalier en colimaçon au bout de 3 tours de vis, soit une dénivellation de 6 m. Elle fait 7 m sur 6, avec un plafond voûté à 3 m. Les murs sont maçonnés et le sol est dallé. C’est actuellement le logis des brigands. On y trouve leur couche ; une longue paillasse d’herbe le long du mur sud, avec une douzaine de couvertures ; un tonneau d’eau fraîche, une table, 2 bancs. Des objets usuels sont posés sur la table et sur le sol (vaisselle, lanterne, etc.) Le butin actuel est entreposé contre le mur est : 6 balles de laine, 6 amphores de 5 litres de miel, 3 tonnelets de 20 litres de vin gris et le coffre au trésor commun, en bois cerclé de fer, verrouillé, difficulté –3. C’est naturellement le chef qui en garde l’unique clé. Le coffre contient 32 pièces d’argent et 220 pièces de bronze.
VUE /Maçonnerie à -4 permet de détecter la porte secrète dissimulée dans la maçonnerie. Il est ensuite facile de l’ouvrir : il suffit de pousser l’une après l’autre les pierres qui la composent jusqu’à ce que l’on tombe sur la bonne, celle qui déclenche le mécanisme d’ouverture. En cas de situation urgente, VUE /Maçonnerie à -6 permet de déceler la bonne pierre au bout de F.T vue x 1 round d’examen. En cas d’échec à tous ces jets, si les personnages sondent systématiquement les murs, ils finiront tout de même tôt ou tard par découvrir le passage. De l’autre côté, dans le laboratoire, la porte se referme et se verrouille par un anneau nettement visible.

4. Le laboratoire. Enfoui sous la tour depuis des siècles, le laboratoire n’est plus qu’un nid de poussière et de toiles d’araignées. Sur la table et sur les étagères, les objets en sont si englués qu’il est presque impossible de les identifier. Un très sérieux coup de balai s’impose...
Remettre le laboratoire en état demandera une trentaine d’heures de travail avec chiffons éponges, seaux d’eau, etc., pour tout refaire briller. Un maximum de 5 personnes peuvent travailler ensemble dans la pièce sans risquer de se bousculer mutuellement. 5 personnes mettront donc 6 heures, 4 personnes 7 heures 1/2, 3 personnes 10 heures, 2 personnes 15 heures et une seule 30 heures. Il s’agit naturellement d’heures draconiques. Tout personnage qui aura travaillé plus de 3 heures à nettoyer le matériel d’alchimie devra jouer DEXTÉRITÉ /Alchimie à 0 (jouer à –11 si on ne possède pas la compétence). En cas d’échec total, et uniquement, il brise un appareil précieux, donnant un malus de –1 (cumulatif) à la future expérience. Les personnages peuvent être prévenus de ce fait avant qu’ils ne touchent au matériel. La porte est, en bois bardé de fer, est verrouillée, -4. La clé se trouve sur une étagère, quelque part sous la poussière.

5. La crypte. Plus humide, avec un sol de terre battue, la crypte est taillée à même le sol et la terre. Elle est basse de plafond : 2,20 m. Malgré la poussière, les toiles d’araignées et les champignons, elle fait penser à une salle de bain. Un grand miroir de cuivre, maintenant corrodé, occupe tout le mur nord. Au centre, une grande bassine de cuivre, oblongue, est posée sur des cales de pierre comme une baignoire. Le long du mur est sont alignés des brocs et des cuves plus petites. Au sud, le squelette d’une vieille armoire vermoulue est encore adossé au mur. Tout cela croule sous la poussière et les moisissures. La porte sud a les mêmes caractéristiques que la porte ouest. Dès que les personnages auront pénétré dans la crypte, ils seront salués (quelle joie !) par le grincement d’une ou plusieurs grincettes.

6. Les souterrains. Ponctués d’escaliers étroits, les souterrains creusés à même la terre et étayés çà et là se tortillent sur près de 600 m et débouchent dans une petite grotte donnant sur le flanc d’un talus à la lisière des bois, à 400 m de la tour à vol d’oiseau. Ils font 2 m de large sur 2,20 m de haut. A l’extérieur, seul le hasard permet de tomber sur la grotte, ou un quadrillage systématique de l’île.



LES BRIGANDS

Les brigands sont commandés par un certain frère Miquel. Ils rançonnent les voyageurs sur la grande route de Tolmod. Ils dissimulent pour un temps leur butin dans la tour de l’île au moyen d’une barque, puis adoptant eux-mêmes l’apparence de marchands, vont écouler les marchandises à Kaldron ou plus au sud encore. Ils se servent pour le transport d’une charrette à bras qu’ils dissimulent entre temps dans la forêt. Pour être sûrs de leur tranquillité, ils n’ont jamais inquiété les villageois de Némur et se cantonnent sur la rive ouest du lac et de l’île. Frère Miquel est un colosse barbu lourde ment botté et vêtu de bure. Sous sa robe, il porte une armure de cuir, ce qui ajoute encore à la carrure de sa silhouette. Il se fait passer pour un sage ayant reçu de la part des Dragons en personne la mission de convaincre les haut-rêvants d’abandonner leurs pratiques. C’est par ce biais qu’il aborde ses futures victimes en commençant par leur demander de participer financièrement à sa mission.
Puis, en réponse à leur refus, il les traite de haut-rêvants et donne l’ordre à sa bande d’attaquer. Ses hommes sont au nombre de 8. Ils ne font jamais de prisonniers.
Le jour où les voyageurs commenceront leur quête, frère Miquel et 5 de ses hommes seront justement partis à Kaldron écouler un grand coffre de vaisselle d’étain. Les 3 derniers resteront à la tour pour surveiller le reste du butin, la laine, le miel, le vin et le coffre. Miquel et les 5 premiers devraient revenir le soir même vers l’heure du Serpent, c’est du moins ce qu’attendent les trois qui sont restés. En fait, de légers incidents de commerce les auront obligés à passer la nuit à Kaldron ainsi qu’une partie du lendemain. Ce n’est que le surlendemain, donc, à la fin de l’heure du Serpent, que frère Miquel reviendra avec ses 5 compagnons.




Réactions des brigands
La réaction des trois premiers dépendra essentiellement de la propre conduite des personnages. En règle générale, s’ils abordent la tour ouvertement, les brigands paniqueront. Ils croiront que frère Miquel et le reste de la bande viennent de tomber et que les voyageurs sont une milice venue les liquider à leur tour. Comme ils savent, à juste titre, qu’ils n’ont aucune clémence à espérer, ils se battront jusqu’au dernier. Tous manient la dague, l’épée courte et l’arc. En temps usuel, deux des brigands sont en bas, dans la cave (N° 3) en train de jouer aux dés, le troisième est au premier étage, surveillant les alentours par les créneaux naturels. La porte est bloquée intérieurement par une grosse pierre. Nul ne doit sortir. Telles sont les consignes de frère Miquel en son absence. Le guetteur descendra donner l’alerte dès qu’il aura aperçu les voyageurs. Deux brigands commenceront alors à barricader la porte avec de nouvelles pierres, tandis que le troisième, remonté aux «créneaux», essaiera de tirer un maximum de flèches sur les assiégeants.
Si l’un ou l’autre est finalement pris vivant et si on l’interroge, il comprendra vite aux questions posées que frère Miquel est toujours sauf et tâchera de dissimuler son existence le plus longtemps possible. Entre autre, il n’avouera qu’en toute dernière instance que le soir, ils sont censés allumer une lanterne entre les murs ouest (visible depuis la rive du lac) pour avertir Frère Miquel que tout va bien. Noter enfin que les brigands sont sincèrement persuadés que leur chef reviendra le soir même.

Retour de frère Miquel
Si le signal n’est pas allumé, les brigands montreront la plus grande prudence. Ils n’aborderont pas à leur plage habituelle, mais à la plage sud-ouest, et commenceront par envoyer un éclaireur discret. S’ils le peuvent, ils prendront les voyageurs par surprise. Et à moins que ces derniers ne fassent preuve d’une défense (magique ?) particulièrement efficace, frère Miquel donnera l’ordre de les exterminer jusqu’au dernier. Si par contre le signal est allumé, les brigands tomberont dans le piège que les voyageurs leur auront éventuellement tendu. Frère Miquel, toutefois, se ressaisira très vite. Il a de bonnes raisons de haïr les hauts-rêvants, il a déjà eu à affronter la magie. Grâce à des jets de résistance réussis (- points de rêve perdus), il a fait autrefois un Rêve de Dragon : Don de sentir le danger. En termes de jeu, cela signifie uniquement qu’il ne peut pas être surpris. Si le combat tourne au désavantage des brigands et si leurs pertes deviennent supérieures à 2 contre 1, ils tenteront de se replier et de fuir.

LA GRINCETTE

Plusieurs dizaines de ces larves vivent dans la crypte (N° 5). Pour assurer les conditions de leur quête, les voyageurs peuvent en capturer une dans un bocal et ne la libérer dans le laboratoire qu’au moment voulu. C’est la partie la plus facile. Le seul problème reste que les grincettes sont minuscules (1 cm) et se dissimulent très bien dans les détritus et les moisissures où elles vivent. Pour en attraper une, une fois localisée, jouer un jet de Dextérité, difficulté libre, la grincette pouvant « parer » avec un jet de Se cacher.

LA CHEMINEE

Les voyageurs auront une mauvaise surprise quand ils voudront allumer du feu dans l’âtre. Toute la fumée refoulera à l’intérieur du laboratoire, rendant l’air irrespirable en quelques rounds. Une conclusion s’imposera : la cheminée est bouchée.
Sur le plan, les conduits de cheminée sont représentés par des gros points noirs. Ils font 45 cm de diamètre et s’élèvent verticalement. Les orifices supérieurs donnaient autrefois dans les merlons du chemin de ronde. Le pan de mur situé à la verticale du labo (côte est) s’élève encore à 8 mètres du plancher du «premier étage», soit à 12 mètres de la base L’orifice du conduit est béant à son sommet, parmi le lierre. Aux personnages de voir comment ils comptent s’y prendre pour ramoner. Grâce au lierre, l’escalade du pan de mur n’est que d’une difficulté –1. Selon la règle usuelle, la vitesse de sécurité est de 1 mètre par round et le jet doit être tenté à chaque round (Livre I page 25). Pour pouvoir se glisser dans le conduit, il faut avoir au maximum une Taille de 7.

Le Noir de Suie
La cheminée est bouchée par une entité de cauchemar incarnée, un noir de suie. Ces entités se forment dans les vieilles cheminées où aucun feu n’a plus été allumé depuis longtemps. Elles peuvent être détruites par les coups, qui diminuent leur endurance, à condition de réussir un jet de points actuels de rêve ajusté à leur nombre actif d’ailes actives. Le feu les enflamme, mais ne les détruit que très lentement : -1 point d’endurance par round. Entre temps, les noirs de suie conservent toute leur autonomie, tout en étant enflammés. C’est même là qu’ils sont le plus terrible. Ils se défendent en projetant des paquets de suie au visage de leur agresseur. Celui-ci doit alors réussir un jet de Constitution ajusté au nombre d’ailes actives de l’entité, ou perdre un nombre d’endurance. La portée à laquelle peuvent être projetés ces paquets de suie est égale en mètres au Rêve de l’Entité. Quand une victime est inconsciente, le Noir de suie la recouvre et la transforme en suie en quelques rounds (même vitesse et processus que pour le Vaseux, Livre I page 78). Quand le noir de suie est enflammé, il projette des paquets de suie enflammée. Les dommages subis sont alors ceux du feu (Livre I page 46) : 1d4 points d’endurance + taux de chaleur du feu. Le taux de chaleur d’un Noir de suie enflammé est égal à son nombre d’ailes actives.
Le noir de suie occupe tout le conduit entre le « premier étage » et le sommet, soit à environ 6 mètres de la base de la tour. Il est là depuis des siècles et est d’un naturel plutôt paresseux. Les tentatives d’allumer du feu dans l’âtre ne le dérangeront pas. Mais si on le ramone, d’une façon ou d’une autre, il sortira de sa torpeur et se laissera couler jusque en bas, faisant irruption dans l’âtre du laboratoire. Faute de victimes vivantes, il commencera éventuellement par transformer en suie tout ce qu’il trouvera en bois.

L’EXPERIENCE

Le fluide rouge pailleté d’argent est un bouillon destiné à obtenir le précipité d’Ionophraste (de l’alchimiste du même nom). Ce précipité entre dans la composition de diverses formules, notamment la teinture d’Erozonne. Au réveil, après le rêve marquant, les personnages ayant zéro ou plus en Alchimie pourront savoir cela. Par contre, pour en connaître également la formule exacte, il faudra réussir INTELLECT / Alchimie à –4. Avec une réussite particulière, on saura également que le bouillon est très instable et que, porté à une trop haute température, il peut réagir violemment.
A défaut, les personnages pourront dénicher de vieux parchemins dans le laboratoire. Pour y trouver la formule du précipité, il faudra consacrer un temps de lecture égal à F.T. INT x 1 heure et réussir Intellect / Lire & écrire à -2. Mais trouver la formule ne sera pas tout. Pour la comprendre parfaitement, il faudra réussir Intellect / Alchimie à -4. Un échec total à la compréhension entrainera un échec total à l’expérience, et un échec normal un malus de -2. Dans tous les cas, l’alchimiste en herbe sera persuadé avoir tout compris. (Il est préférable que les jets de dés soient tirés en secret des jouers).

Les ingrédients. Pour réaliser le précipité, il faut différents sels métalliques, un peu de suie, du salpêtre, 20 centilitres de sang humain et 5 pépins de paillettes argentées de plumes de zyglute. Tous ces ingrédients se trouvent dans le laboratoire, miraculeusement conservés dans des bocaux étanches, sauf le sang et les paillettes.
Avec Alchimie à zéro ou plus, les ingrédients peuvent être identifiés automatiquement. Trouver le sang ne devrait pas poser de difficulté (–1d4 points d’endurance pour le donneur) Pour les paillettes, il faudra une plume de zyglute.

Les Marais Gris. A Némur, les personnages pourront apprendre qu’on trouve effectivement quelques zyglutes sauvages dans les Marais Gris au sud du lac. Mais ces marais ont mauvaise réputation : ils sont infestés de moustiques et de serpents, et des brouillards mouvants s’y forment à tout instant, rendant l’orientation difficile. En termes de jeu, la survie y est de difficulté –4. Chaque heure d’exploration, faire tirer à chacun un jet de Chance (ajusté astrologiquement). Une réussite annule un échec, et réciproquement. Si les réussites sont supérieures aux échecs, on découvre une zyglute à la limite de la vision permise par le brouillard (30-40 mètres). Restera à l’attraper pour lui voler une plume. Si les échecs l’emportent, pas de zyglute pour cette heure-là, mais à la place un prédateur quelconque, une vipère des marais, par exemple. Si tous les jets de CHANCE réussissent et si quelqu’un réussit VUE /Survie en marais à -4, on trouvera directement une plume de zyglute (une belle plume de queue) abandonnée sur le sol par sa propriétaire. Enfin, si le Gardien des Rêves désire corser l’affaire, mais c’est très facultatif, il peut faire véhiculer la fièvre brune par les moustiques (utiliser les caractéristiques données Livre I page 48).




L’expérimentation
Tous les ingrédients étant réunis, sels, sang, paillettes, etc. ; tout le matériel, bien propre et bien astiqué, étant disposé comme il faut sur la table, il faudra 30 minutes pour faire passer le fluide dans le serpentin à la couleur désirée. Pour que tout se passe normalement et que l’expérience soit concluante, il faudra réussir un jet d’Alchimie à -3 avec pour caractéristique la moyenne de Intellect + Dextérité. Se souvenir que la difficulté originelle de -3 peut être ajustée de différents malus : appareils brisés, échec à la compréhension. Si plusieurs alchimistes prétendent travailler ensemble, ils doivent tous réussir leur jet ou se gêner mutuellement. Qui plus est, en supposant la difficulté restée à -3, si un alchimiste échoue, l’autre devra réussir à -4 pour contrebalancer l’erreur, et ainsi de suite. En cas d’échec, pas question d’interrompre une fois le processus lancé. Un nouveau jet devra être tenté avec une pénalité supplémentaire de -1 ; et ainsi de suite de round en round, jusqu’à la réussite ou l’échec total.

Echec total. Un échec total entrainera une violente explosion ruinant complètement le laboratoire. Le ou les alchimistes, ainsi que tous les personnages situés à moins d’un mètre du serpentin, devront encaisser des dommages à +11 ; ceux situés au-delà encaisseront à +8. Il est fort possible que l’explosion tue tout le monde.

CONCLUSION

Mais si tout se passe bien, si le précipité se transvase sans anicroche, si le feu pétille joyeusement et si la grincette grince (elle ne demandera que ça une fois libérée), les personnages pourront continuer leur rêve dès la prochaine nuit et gagner leurs 60 points d’expérience. Dans leur incarnation antérieure, ils étaient au service du prince Obniuk et envoyés par celui-ci chez maître Són pour savoir où en étaient ses recherches. « Elles progressent, répondit maître Són. Mais en attendant le résultat définitif, vous pourrez dire au prince que dans la pièce voisine (la crypte), j’ai installé un dispositif qui, au moyen d’eau chaude, d’éponges, de brosses et de savon, pourrait, dans un premier temps, faire beaucoup pour lui. »

Frère Miquel, né à l’heure du Serpent, 90 kg, 1m99, 38 ans.

Taille 14 VOLONTÉ 15 Vie 15
APPARENCE 12 INTELLECT 10 Endurance 32
CONSTITUTION 15 EMPATHIE 14 protection d3
FORCE 18 ELOQUENCE 14 VITESSE 14
AGILITE 14 REVE 17
DEXTERITE 12 CHANCE 12
VUE 12 Mêlée 16
OUIE 13 Lancer 15
ODORAT 11 Tir 12
GOUT 10 Dérobée 10
Epée 1 main niv +7 init 15 +dom +7 (bâtarde)
Dague mêlée niv +5 init 13 +dom +4
Dague de jet niv +5 init 13 +dom +3
Arc niv +5 init 11 +dom +2
Corps à Corps niv +5 init 13 +dom (d4+3)
Esquive niv +6
Discrétion, Se cacher +5 ; Saut, Course +5 ; Srv en extérieur +5 ; Natation +5
Tête de Dragon : Don de sentir le Danger (sur jet d’Empathie à +4)
Frère Miquel est armé d’un arc, de 12 flèches, de 3 dagues et de son épée bâtarde. Sa protection lui vient d’un excellent cuir souple (sous sa robe de bure). Suite à la vente de marchandises volées, il possédera 15 pièces d’argent et 60 pièces de bronze réparties en deux bourses.

Les huit brigands

TAILLE 11 VOLONTÉ 11 Vie 12
CONSTITUTION 13 EMPATHIE 12 Endurance 24
FORCE 13 RÊVE 11 protection d2
AGILITÉ 13 Mêlée 13 VITESSE 12
DEXTÉRITÉ 12 Tir 12
VUE 12 Lancer 12
OUÏE 12 Dérobée 11
Épée 1 main niv +4 init 10 +dom +3 (courte)
Dague mêlée niv +4 init 10 +dom +2
Dague de jet niv +4 init 10 +dom +1
Arc niv +5 init 11 +dom +2
Corps à Corps niv +3 init 09 +dom (d4+1)
Esquive niv +4
Discrétion, Se cacher +5 ; Saut, Course +5 ; Srv Extérieur+5 ; Acrobatie +1 ; Natation +5
Tous les brigands sont armés d’un arc, de 8 flèches, de 2 dagues et d’une épée courte. Ils n’ont aucune valeur sur eux. Tous sont loyalement dévoués à frère Miquel.

Caractéristiques moyenne des zyglutes

Taille 9 Perception 8 Vie 10
Constitution 11 Volonté 2 Endurance 30
Force 13 Rêve 12 Protection -1
Vitesse 14/32/58
Coup de bec 9 niv 0 init 4 +dom 0
Esquive 10 niv +3
Course 12 niv +5 ; Srv en marais 12 niv +10

Caractéristique du Noir de suie

Rêve 21 Endurance 26
Taille 5 Protection 3 ailes actives
Vitesse 8/-/-
Attaque de suie 13 niv +4 init 10 +dom (3) portée 21 mètres

Caractéristiques moyennes des grincettes

Taille 1 Volonté 2 +dom non applicable
Constitution 1 Rêve 9 Protection -15
Force 1 Vie 1 Vitesse 1/-/-
Perception 3 Endurance 3
Se cacher 14 niv +3

Denis Gerfaud